Rylee || C'est de la confiance que naît la trahison.

TW abordés: dépression post-partum, schizophrénie, homicide, tentative d’infanticide, relations toxiques, homophobie, racisme, tentative de viol, décès & deuil

• Ta naissance n’a rien d’un conte de fées ou alors il serait indubitablement écrit par les frères Grimm et leurs plumes sadiques. Pourtant, sur le papier, tout avait bien débuté : Fergus et Brooke eurent un véritable coup de foudre l’un pour l’autre, en se croisant dans un bar du coin. Ils ne s’étaient plus quittés tant et si bien qu’après quelques mois de fréquentation, ils décidèrent de fonder une famille. Tu es survenue rapidement dans leur existence. Peut-être trop vite, justement. Tu n’as que cinq mois lorsque tu es placée aux services sociaux in extremis, rejoignant une adorable dame à la retraite qui s’occupera de toi pendant trois mois – le délai nécessaire à une adoption. Si on se contente de dire que ton papa est « parti dans le Ciel » et que ta maman est « trop malade » pour s’occuper de toi, tu apprendras, de nombreuses années plus tard, la sombre vérité par la bouche de tes parents adoptifs : Brooke a fait une profonde dépression post-partum, entrainant une crise schizophrénique aiguë durant laquelle elle assassina violemment Fergus avant de tenter de s’en prendre à toi. Fort heureusement, les voisins furent alertés par les cris stridents émis ce soir-là et la police put intervenir juste à temps pour que ta vie soit épargnée. Acte héroïque sur fond de détresse humaine, c’est ainsi que tes premiers mois furent marqués par l'apothéose d'une tragédie imprévue. • Abby et Robin Barlett t’adoptèrent à l’âge de huit mois. Une bénédiction pour ce couple de trente-cinq et quarante-deux ans dont les problèmes de fertilité demeurèrent inexpliqués. Etant donné ton métissage, il ne fut toutefois pas nécessaire d’expliquer à autrui que tu n’es pas leur enfant biologique : cela saute aux yeux. Abby a toujours été dotée d’une magnifique tignasse blonde, de yeux azurés et d’une peau pâle sans imperfection tandis que son époux, Robin, fut paré d’une indomptable crinière rousse accentuée par sa barbe opulente, un regard à la couleur des feuilles de printemps et une peau tachetée de grains de beauté. Autant admettre que ton épiderme bronzé, tes yeux marron d’automne et tes cheveux noirs ne permettaient que rarement le doute. Bien sûr, certaines mauvaises langues qui ne connaissaient pas le parcours du couple ont toutefois prétendu que tu étais née d’une infidélité de Monsieur Barlett avec une femme de petite vertu. C’est donc sur ces jugements hâtifs que tu fis ta rentrée scolaire, après avoir passé plusieurs années de quiétude avec tes deux parents qui ne détournaient jamais longtemps le regard sur toi. Choyée, profondément aimée et protégée, c’est armée de ce sentiment de bienveillance que tu as fait tes premiers pas vers la cruauté des enfants. Pas spécialement car tu étais métissée, non : tu n’étais point la seule môme à ne point être blanche. Ce qui justifiait les moqueries était plus pervers : ton adoption. Ton « illégitimité » à être tant appréciée. La curiosité malsaine des autres parents avait poussé les autres enfants à t’infliger des railleries fréquentes. Tu fus blessée, évidemment, et déconcertée par la mesquinerie de tous. Malheureusement, ce sentiment te poursuivra toute ton existence et sera régulièrement alimenté par des soi-disant « plaisanteries » sous couvert de racisme à peine dissimulé. Les années n’arrangeront rien mais te doteront, au moins, d’une profonde capacité de self-control et d’innombrables joutes verbales qui affuteront tes réparties cinglantes. • Petite fille dynamique et joviale, tes parents ont parfois du mal de suivre la cadence que tu imposes. Désireux de t’offrir la meilleure éducation possible et de satisfaire tes besoins de te dépenser, ils se mirent en quête de multiples activités afin de susciter ton intérêt : les arts, avec les ateliers de dessins et les leçons de solfège, les disciplines sportives, avec les cours de natation et de danse, ou même la chorale de l’église – le chant n’étant véritablement pas ta destinée. Tu n’étais guère motivée longuement par les propositions soumises, virevoltante entre les différentes occupations sans réel « coup de cœur ». C’est en visitant un ranch pour chevaux, peu après ton sixième anniversaire, que tu suppliais lourdement tes parents adoptifs afin de t’inscrire à l’équitation. Frileux, ils hésitèrent un moment mais cédèrent face à ta détermination et tes nombreuses tentatives de charmes. Jamais ils ne le regrettèrent : ce sport-là devint ta passion. D’autant que la présence des équidés possédait la faculté de t’apaiser. A défaut d’être très sociable avec les autres humains, tu t’épanouissais auprès des animaux. Cela t’obligeait certes à te montrer responsable, aussi, ce qui ne leur déplaisait aucunement. Bien sûr, tu fus parfois heurtée à nouveau par les préjugés des autres cavaliers, surtout les parfaites demoiselles blanches issues de la bourgeoisie locale qui te dévisageaient comme si tu débarquais d’une lointaine galaxie. Cependant, en devenant plus âgée et en remportant des concours, tu te fis rapidement ta place comme une compétitrice émérite et tu gagnas le respect de tes pairs – du moins la plupart – te créant un cercle d’amis avec qui vous aviez un centre d’intérêt commun plutôt prenant. • Les années s’égrainèrent avec la légèreté de l’enfance. Puis, ce fut le temps du printemps de ton adolescence. D’aussi loin que tu t’en souviennes, tes yeux foncés ne se déposèrent jamais avec complaisance sur les garçons de ton collège. Tu appréciais leur compagnie sans point être dotée de la moindre attirance à leur égard. Rapidement, tu compris que tes désirs se nourrissaient pour les êtres humains dotés du même sexe que le tien. Tu eusses honte, au départ, évidemment. Tu avais l’impression de cumuler tant de « défauts » pour lesquels tu ne choisissais rien. Fort heureusement, tu eusses la possibilité d’en parler plutôt ouvertement à Abby. Elle fut la première au courant de ton orientation sexuelle et n’en fit nullement cas. Elle t’aimait et t’acceptait telle que tu étais. Ensemble, vous en parlâtes à ton père, Robin, qui eut la même réaction positive et bienveillante. Cependant, tu gardas ce morceau de toi sous silence durant plusieurs années afin d’éviter une autre forme de harcèlement potentiel ; tu en avais assez souffert, plus jeune, et tu ne tenais pas à ce que cela recommence sous un nouveau prétexte. Ce n’est que lorsque tu entras au lycée et fis la connaissance de Zoey que ton monde se mit à basculer. Jamais encore tu n’avais éprouvé un tel intérêt pour une autre fille. Rapidement, elle devint ton amie. Elle se confia à toi et vous passiez des heures ensemble à rire dans vos chambres, la tête dans les nuages, tout en prétextant des devoirs à effectuer. Les mois vous rapprochèrent, jusqu’à ce que vous échangeassiez votre premier baiser. La relation mit toutefois du temps à émerger puisque Zoey s’interrogeait sur son orientation et ne voulait pas « détruire » votre amitié. Vous n’étiez donc pas réellement « ensemble » mais pas célibataires non plus. Flirt dangereux sur cette limite floue qu’elle t’imposait et dont elle abusait parfois. Vous sortiez avec des amis et elle en profitait pour embrasser d’autres personnes, trompant vos promesses, avant de déclarer qu’elle était amoureuse de toi « mais »… Parce qu’avec Zoey, il y avait toujours un « mais ». La jalousie vint frapper à votre porte, progressivement. Puis, lorsque tu imitas son propre comportement en draguant d’autres filles, elle devint plus agressive encore. Il y eut une claque. Des griffures. Des disputes avec crépage de chignon, aussi. Elle s’excusait, à genoux, avant de recommencer ses méfaits. Elle t’accusait aussi, parfois, d’être responsable de tout ce foutoir – alors que tu n’avais l’impression que de l’attendre désespérément et d’espérer les miettes de ce cœur de glace qu’elle ne te donnait point complètement. Deux ans de calvaire : ce fut le temps nécessaire pour que tu y mettes un terme définitivement, alimentée par cette nécessité absolue de te libérer de tes chaines. Bien sûr, elle revenait de temps en temps, avec des paroles acerbes ou des sous-entendus mesquins, espérant piquer ta vulnérabilité et tes émois, puisque vous étiez dans la même classe de lycée. Tu l’ignorais, blessant son égo démesuré, car tu savais que tôt ou tard, elle te laisserait tranquille. Et lorsqu’enfin elle se trouva une nouvelle victime, elle préféra le silence aux remarques déplacées, t’octroyant la paix. Non sans que cela laisse, malgré toi, une meurtrissure à ton âme. • Elève plutôt intelligente, même si tu n’étais pas dans le top trois de la classe, tu n’étais guère intéressée par les perspectives de hautes études. Tu privilégiais tes concours hippiques et ton cercle d’amis de là-bas plutôt que de te formater à des recherches de performance pour atteindre les universités. Pourtant, on te proposa même une bourse grâce à tes résultats équestres ou des stages à l’étranger – notamment en Europe. Tu n’en voulais point car, depuis ta plus tendre enfance, tu avais toujours su quel était ton objectif professionnel. Tout comme ton père, tu voulais devenir officier de police. Pour cela, tu savais que tu devrais atteindre ta majorité – 21 ans – et également être au bénéficie de soixante crédits en université agréée ainsi qu’avoir effectué deux ans de service militaire. C’était « ça », ton projet de carrière, à la grande surprise générale. Bien sûr, Robin était extrêmement fier que tu veuilles suivre la même voie que lui. Abby était maternellement plus inquiète mais ne s’opposait en rien à tes envies. Ils te soutinrent tous les deux dans tes démarches, appuyant tes décisions avec fermeté envers quiconque oserait les remettre en doute. C’est donc grâce à eux et leur soutien sans commune mesure que tu réalisas ton rêve : intégrer la police. Métier dont tu rêvais et que tu exerces toujours, en dépit des obstacles rencontrés sur ta route. • Être une femme, métissée, ambitieuse et homosexuelle : des caractéristiques qui ne plaisaient pas aux misogynes et aux racistes qui se trouvaient malheureusement parfois dans tes collègues. Malgré les embûches, tu tins bon et tu parvins à attiser le respect de tes pairs. Quant à ceux qui ne t’appréciaient pas, tu te contentais de les ignorer la plupart du temps ou de leur renvoyer des sous-entendus à double sens lorsque tu le pouvais. Puis, un jour, on t’octroya un nouveau partenaire, plus âgé mais fort sympathique et très apprécié de ses camarades : Horace. D’abord méfiante, tu restais distante avec lui. Progressivement, il parvint à gagner ta confiance et vous devîntes un duo plutôt efficace sur le terrain. Peut-être fusses-tu aveuglée par votre amitié, ne remarquant pas des signes qui auraient dû t’alerter, Rylee. Une main sur ton épaule, un sourire chaleureux, des compliments sur tes capacités… rien qui, pourtant, n’était accablant. Jusqu’à ce fameux soir où, en permission, vous rejoignîtes des collègues à vous dans un bar. L’alcool fut plus abondant que d’ordinaire bien que les blagues demeurassent « bon enfant ». L’ambiance était au rendez-vous et tout le monde s’amusait. Cela dit, alors que tu sortis prendre l’air, Horace te suivit. Il était ivre, certes, mais la lueur dans son regard trahissait clairement son comportement. Il devint « trop » tactile à ton goût et tu te mis à le repousser gentiment. Devant son insistance, tu le fis plus fortement et une dispute entre vous éclata. Soudain, il te frappa au visage et te plaqua contre le mur, préférant des mots dégueulasses à ton encontre. Il estimait que si tu n’avais jamais cédé à un homme, c’est parce que tu n’avais pas rencontré « le bon ». Aussi qu’une fille « comme toi », en parlant de ta couleur de peau, devrait s’estimer qu’un homme blanc respectable comme lui daigne s’intéresser à ton entre-cuisse. Tu fus d’abord tétanisée mais dans un instinct de lucidité et de survie, tu réussis à lui asséner un coup de tête en plein visage, fracassant son nez dans la foulée, ce qui te permit de te dégager de son emprise. Affolée, horrifiée, tu déboulas dans le bar en tremblant et pleurant comme si tu étais redevenue une fillette. Bien sûr, Horace tenta de se défendre face à son comportement en suggérant que tu l’avais allumé, que tu étais une hystérique. Il retournait la situation, s’octroyant le statut de victime ! Son stratagème fut rapidement compris par les caméras de surveillance, installées récemment dans le quartier par la mairie. Sa parole ne valut plus rien et tu portas plainte contre lui. Il écopa d’une mise à pied de par vos supérieurs mais préféra démissionner, honteux face à vos collègues. Evidemment, il te détestait profondément et te portait responsable de son divorce imminent ainsi que de sa mauvaise presse. Son attitude pugnace ne l’aida pas et, gentiment, d’autres langues se délièrent à son encontre. D’autres femmes qui furent, elles aussi, agressées par ce sale type. Autant dire qu’après son congé fortement recommandé, plus personne ne le revit dans les parages. • Les années se poursuivent. Après des mois de thérapie, tu te remis de ton agression. Pourtant, une nouvelle fois, les difficultés vinrent frapper à ta porte lorsque, par une fin de journée exténuante, tu reçus un message vocal sur le répondeur de ton téléphone alors éteint. Une voix féminine se présenta comme étant l’avocate d’une dénommée « Brooke », incarcérée dans un centre de soins fermé depuis plus de deux décennies pour meurtre. Ta mère biologique, dont tu n’ignorais pas le passé et à laquelle tu évitais soigneusement de songer. La représentante de la justice était désireuse que tu viennes témoigner de son état mental stable tout en te proposant de la rencontrer en personne, ceci dans le but de rouvrir le dossier et d’effectuer un aménagement de peine moins contraignant. Tu fus déboussolée, Rylee. Profondément. Tu mis beaucoup de temps avant d’accepter de rencontrer cette femme qui partageaient ton ADN. Rien de plus. Lorsque vous vous vîntes, à travers cette vitre épaisse mais transparente, tu reconnus tes propres traits. Sentiment étrange qui te submergeait pour l’unique fois de ton existence : tu ressemblais à un autre être humain sur cette planète. Les échanges furent brefs et maladroits car tu demeurais fermée. Prête à écouter mais pas à répondre à ses attentes. Elle avait envie de t’écrire des lettres, de t’appeler, de te voir. Tu n’étais pas certaine d’accepter de lui octroyer une place dans ta vie. Surtout parce qu’elle avait assassiné ton père biologique. Bien sûr, les médecins prônaient une folie dite « passagère », désormais gérer par les nombreux médicaments et les thérapies récurrentes. Son comportement, selon son dossier, paraissait quasiment irréprochable et ils estimaient qu’elle serait mieux dans un espace plus ouvert. Moins stricte. Tu estimas qu’elle payait un lourd tribut pour un mal contre lequel elle lutterait jusqu’à son dernier souffle mais qui n’était pas de sa volonté pure. Aussi acceptas-tu les lettres et les appels sans promettre des visites régulières. Lien fragile et complexe que le vôtre. Néanmoins, grâce à ta bienveillance, elle bénéficie désormais de meilleurs soins et profite d’une plus grande liberté d’exister même si elle demeure étroitement surveillée. • L’année 2019 sera celle qui marquera ta vie de nouveaux tournants mais surtout qui te frappera d’un deuil duquel tu ne t’es pas rétablie. Ton papa, ton héros, s’était endormi dans son sommeil, à l’âge de soixante-et-onze ans. Son cœur avait juste cessé de battre et il n’avait pas souffert, laissant toutefois une veuve et une orpheline – à nouveau – derrière lui. Tu fus dévastée de cette perte qui te projetait face à tes démons tout en agrandissant les plaies de ton âme écorchée. Tu n’étais pas prête à le perdre. Tu te renfermas encore plus sur toi-même dans le but d’effacer tes émotions. Autant dire que lorsque la boîte de Pandore s’est ouverte, des mois après son décès, ce fut un véritable raz-de-marée émotionnel. Tu fus submergée par tant d’états contradictoires que tu eusses peur de devenir folle, comme Brooke. Heureusement, tu pus compter sur le soutien de tes proches, amis et famille. Surtout sur celui de Cheryl, ta confidente, amie et collègue depuis deux ans avec qui tu partageais bien des traumatismes. Tu fus présente pour elle lors de sa séparation compliquée avec son fiancé, essuyant ses larmes du mieux possible et prodiguant un baume cicatrisant sur son palpitant. Elle fut, à son tour, très présente pour cette épreuve douloureuse. Un véritable pilier. • Vote relation a dérapé, un soir de cette même année. Tu ne t’y attendais pas, Rylee, tu devais l’admettre. Son baiser fut inattendu, initié probablement par le vin rouge que vous aviez bu. Tu lui avais dit que ce ne serait pas une bonne idée de passer la nuit ensemble, malgré ses suppliques. Pourtant, elle était sûre d’elle et te répétait en boucle que c’est ce qu’elle désirait depuis des semaines. Vous entamâtes alors une relation compliquée. Collègues au travail, amantes derrière les murs épais de vos appartements ; tantôt amies tantôt petites-amies, au gré des élans émotionnels de Cheryl. Tu avais la sordide impression de te retrouver à nouveau prisonnière d’une relation d’autrefois, celle avec Zoey. Chery disait qu’elle avait besoin de temps, que jamais elle n’avait été amoureuse d’une femme auparavant et qu’elle ne voulait pas brûler les étapes. Votre pseudo-couple connut alors des hauts et des bas. Parfois elle te parlait d’avenir et d’autres fois de séparation. Tu proposas de lui laisser de l’espace et du temps, de consulter une psychologue avec ou sans ta présence. Cela dura environ trois longues années durant lesquelles vous eûtes des pauses, des retrouvailles, des espoirs et des désillusions mais surtout des sentiments puissants. Du moins pour toi. • Tout s’écroula il y a environ un an de cela. Toutes les deux profondément ambitieuses, on vous informa qu’un poste de capitaine allait se libérer prochainement et que vous étiez dans les candidats favoris pour occuper ce poste emblématique et convoité. Ton envie de rendre fier ton père, de là où il était, et de prouver à toute la communauté qu’une femme métisse homosexuelle pouvait réussir malgré les entraves te poussèrent à la compétition. Il en fut de même pour Cheryl et les autres. Vous vîntes alors à travailler fort, tous autant que vous étiez, et la concurrence fut de moins en moins nombreuse bien que qualitative. Chacun y allait de ses compétences pour tenter de devenir l’élu. Pendant des semaines, il n’y eut rien de déloyal ou de répréhensible. Juste une grande rivalité entre vous tous. Malheureusement, la nature humaine revient au galop et les masques tombent dès lors que la limite de la décence est franchie. C’est ce qui arriva à Cheryl, incapable d’accepter une stagnation de carrière ou que quiconque lui passe devant. Son comportement se mit à changer, brusquement. Plus douce, plus attentive et tendre avec toi en dehors des bureaux, tu sentais que ça n’allait pas réellement. Qu’elle dissimulait un malaise profond dont elle ne désirait pas parler. Tu fis preuve de patience, te disant que la rudesse de ce concours interne l’affectait peut-être plus que tu ne le pensais. Tu ne croyais pas si bien songer, Rylee ! La vérité éclata lorsqu’un de tes supérieurs et amis, pendant d’une soirée de détente dans un bar, se permit une allusion sordide à ton sujet qui te glaça le sang. Il parla ouvertement de ton incapacité à obtenir le poste de capitaine parce que tu aurais bénéficié de la même tare génétique de ta « psychopathe de mère meurtrière ». Information sur ton passé qui n’était détenue par personne d’autre que Cheryl : la seule à qui tu avais confié la tragédie de ton abandon et les difficultés de ce lien avec cette femme dont tu partageais les gènes. Suspicieuse et bouleversée, tu t’emportas sur le pauvre bougre au Q.I. d’huître qui te confia sans pudeur qu’il s’était tapé Cheryl, ignorant tout de votre relation d’amantes, et que cette dernière l’avait fait uniquement pour obtenir un vote favorable supplémentaire lors des délibérations. • Des larmes. Des cris. Des injures. Deux cœurs qui se brisèrent. Cheryl te supplia de lui pardonner. Tu refuses. Ta confiance a été annihilée par cette trahison supplémentaire. Celle de trop. Non seulement elle a couché avec une autre personne alors que vous étiez ensemble mais en plus elle t’a planté un poignard dans le dos. Tout ça parce qu’elle sentait que sa convoitise lui échappait. Elle n’a pas hésité à devenir un rouleau compresseur et à massacrer votre relation. Tu lui balanças ses affaires par la fenêtre de ton appartement sans une once de ménagement, déferlant ta colère aussi sur les photos que vous aviez prises ensemble et qui trônaient discrètement dans ta chambre. Tu supprimas tout. Tu cassas tout. Tu exhortas ta rage en même temps que tu sentais les morceaux de ton cœur s’éparpiller aux quatre vents. La rumeur de ta tragédie se propagea telle une poudre à canon au sein des rangs du département de police. Tu ne pus le supporter. Tu songeas à tout abandonner, à tout envoyer valser. C’était sans compter sur l’appui d’un de tes amis, récemment promu, qui te suggéra de changer d’air. Sur une recommandation professionnelle positive, il fut certain que tu pourras te reconstruire ailleurs puisque c’est ce dont tu avais besoin en ce moment. Rien ne t’empêchera de revenir en arrière, si c’est ce que tu souhaitais ensuite. Tu acceptas car tu savais que tu serais incapable de côtoyer Cheryl. C’était au-dessus de tes forces. Tu profitas alors d’un de ses jours de congé pour revenir au travail te saisir de tes affaires et vider ton bureau définitivement. Pas un mot d’adieu ni une explication. Tu fuyais, possiblement. Tu n’envisageais aucune autre issue favorable à ton sort avec de telles circonstances. C’est donc ainsi que tu t’embarquas pour un nouveau départ à Seattle, en mai 2023, dénichant une chambre dans une colocation.