Say you're mine, I'm yours for the night ~ Marlon

« Ça ne peut plus durer » un enfant normal aurait levé des yeux remplis de tristesse sur ses parents à l’entente de ces cinq mots, apeuré de le couple se briser mais pas Marlon parce qu’il ne faut que quelques minutes de plus pour que la phrase « on va surmonter cette épreuve » sorte de la bouche de son père. Il n’a que douze ans et pourtant, son quotidien est composé des mêmes disputes, causées par les tromperies incessantes de Jody qui, à force, ne s’en cache même plus. Parce qu’elle sait que son époux lui pardonne tout, et passera toujours au dessus de ses infidélités répétées. Ils ne sont plus heureux ensemble depuis longtemps, peut-être même que son père n’est pas celui qu’il pense et pourtant, ce dernier n’a pas l’air de vouloir prendre des valises… ou que sa femme le fasse. Il apprendra plus tard qu’il prenait sur lui pour le bien-être de Marlon, pour ne pas avoir à lui imposer deux maisons, l’absence plus ou moins prolongés de l’un des parents ou encore des allers et retours au tribunal pour des décisions judiciaires susceptibles de mettre la quiétude de leur famille à l’épreuve.

Loin d’être dans la liste des élèves populaires du lycée, il a longtemps eu du mal à trouver sa place, se sentant souvent de trop, bien trop différents de tous les autres jeunes de son âge. Parce qu'il n'était pas du genre à sortir après les cours ni même à faire le mur pour aller boire des bières et fumer en cachette de ses parents. Peut-être qu'il y avait d'autres personnes comme lui autour mais le fait est qu'il ne les a jamais trouvé. Il a intégré plusieurs clubs pour tenter de s’intégrer ; celui de musique, qui lui a permis de se rendre compte qu’il n’était pas capable de tenir une guitare sans que les cordes ne lui sautent en plein visage, celui de dessin et art plastiques, grâce auquel il a compris qu’il n’était pas manuel pour un sou et qui lui a valu de devoir se couper quelques mèches de cheveux qu'elles aient trempées, sans qu'ils s'en rendent compte, dans un pot de colle forte liquide, ensuite le club d’informatique où il s’est étrangement épanoui pendant plusieurs semaines avant de se lasser et contre toute attente, le club de basket qui s'est présenté comme étant son dernier espoir pour trouver sa voie. Et contrairement aux autres, il ne l'a jamais quitté.

Véritable révélation, il s’est métamorphosé au fil des mois, que ce soit physiquement ou dans sa façon d’être. Il a surpris tout le monde et le gamin réservé a rapidement laissé la place au sportif qu’il ne s’était jamais imaginé pouvoir être. D’abord remplaçant qui passe tout un match sur le banc, il a fini par se hisser au poste de capitaine, menant son équipe à la victoire pour la quasi totalité des matchs qu’ils ont été amenés à jouer, prouvant ainsi à toutes les personnes s'étant foutue de lui à son arrivée qu'ils pouvaient désormais fermer leur clapet. Cette nouvelle ère lui a d'ailleurs permis d'avoir sa première petite-amie et même s'il était conscient qu'elle ne s'était jamais intéressée à lui avant ça, ça lui a donné la possibilité de découvrir la joie des plaisirs à deux alors pas de quoi en vouloir à cette demoiselle.

« Nous avons le plaisir de... » Il n'a pas le temps de terminer de lire la phrase qu'un cri lui échappe, suivi de celui de son père qui, dans son dos, était lui aussi en train de se ronger les ongles de stress à l'idée de savoir si, oui ou non, Marlon était accepté à la Seattle University Athletics. Il a passé tous les tests - les réussissant avec brio - et sa demande de bourse ayant été accepté, il ne lui manquait plus que cette réponse positive avant de pouvoir s'envoler pour Seattle et suivre le cursus sportif dont il rêve depuis des années maintenant. Si son père s'est montré à la fois ému et heureux pour lui a l'aéroport, sa mère n'a même pas daigné faire le déplacement, prétextant qu'elle avait un empêchement important. Elle lui a dit au revoir plus tôt dans la matinée, avant de partir Dieu sait où. Triste preuve de la relation bancale qu'ils partagent. La dernière étreinte avec son paternel a duré de longues minutes avant que Marlon ne se force à le lâcher pour s'éloigner et marcher la tête haute vers ce nouveau rêve qui s'ouvre à lui. Les premières semaines ont été un chouïa compliquée mais une fois le rythme assimilé, il s'est montré digne des attentes qu'on avait de lui, continuant de s'améliorer encore et encore, atteignant à nouveau l'un des meilleurs postes dans son équipe.

Diplôme finalement empoché avec les félicitations du corps professoral, il s'est vu offrir une place de choix dans l'une des équipes de la ville, lui permettant ainsi de pouvoir exercer directement dans ce qu'il aime dès sa sortie de l'université. Ses performances ont fait de lui l'étoile montante du basket à Seattle mais toutes les bonnes choses ont une fin, pas vrai ? Tout était trop beau pour que ça continue de rouler, il aurait dû se douter que quelque chose viendrait noircir le tableau tôt ou tard. Et il aurait préféré que ça ait lieu le plus tard possible ; élongation des ligaments de la cheville combiné à une fracture osseuse. Opération obligatoire, impossible pour lui de pouvoir continuer jusqu'à guérison complète, et encore, ce n'est même pas sûr.

Dans son malheur, il a eu de la chance - c'est en tout cas de cette façon qu'il aime le voir - puisqu'il a rencontré Jenna. Infirmière s'étant occupé de lui durant le début de sa convalescence à l'hôpital, elle a continué ses soins à domicile et lorsqu'elle n'a plus eu besoin de venir, Marlon lui a proposé un date, puis deux, puis trois, autant de rendez-vous nécessaire pour qu'ils finissent par se mettre ensemble. Fou amoureux, elle est devenu sa préoccupation première, son principal soutien lorsqu'on lui a apprit qu'il ne pourrait plus jouer. Elle est celle qui l'a orienté pour qu'il puisse continuer à exercer dans le domaine du sport et c'est tout naturellement qu'il lui a demandé sa main après quatre ans d'amour. Ca fait désormais une année entière qu'ils sont fiancés et Jenna se plonge corps et âme dans les préparatifs du mariage alors que Marlon, de son côté, a la tête ailleurs depuis plusieurs semaines et pour cause, son attention n'est plus focalisé uniquement sur celle qui partage sa vie depuis qu'elle lui a présenté quelqu'un d'autre...

Son regard fixe son reflet dans le miroir de la salle de bain et il se dégoûte, a la désagréable sensation de faire face à sa mère alors que cette dernière revient, l’air de rien, après avoir passé un moment avec un homme autre que son père. C’est exactement ce qu’il vient de faire, ses cheveux en bataille témoigne des doigts qui s’y sont faufilés pour s’y agripper sous le plaisir. Il se penche vers le lavabo et s’envoie une grande quantité d’eau froide en plein visage avant de ressortir pour retourner dans la chambre. « Faut que tu t’en ailles, Jenna ne va plus tarder à rentrer. » Il évite de poser les yeux sur Sven alors qu’il récupère son tee-shirt qui traîne au sol. Il ne le regarde pas parce qu’il n’a pas envie de voir la déception et la colère se peindre sur son visage. Il enfile à nouveau ce masque qu’il veut impassible et quitte la pièce pour rejoindre le jardin, allumant une cigarette alors qu’un sursaut le secoue quand il entend la porte d’entrée claquer après le passage du plus jeune.

Une dizaine d’années de moins que lui, un patient de sa fiancée et pourtant, il est incapable de rester loin de lui, de se résoudre à dire non à tout ce qu’il lui apporte et à comment il le fait se sentir. Et peu importe le nombre de fois où Sven lui dit qu’il ne veut plus rien avoir à faire avec lui, il sait qu’il fini toujours par revenir vers lui. La vérité c’est qu’il l’aime plus qu’il ne veut bien l’avouer mais c’est plus facile, actuellement, de procéder comme ça.

Anecdotes — amateur de bons vins, il possède plusieurs bonnes bouteilles qu’il garde précieusement à la cave, ne les sortant que pour les grandes occasions. Autant dire qu’aucune occasion ne lui a encore semblé être suffisamment importante pour lui donner envie d’en déboucher une ; tout comme pour le vin, c’est un amoureux du fromage sous toutes ses formes, de la pâte molle à la pâte dure, fort ou doux, vieux ou jeune. C’est son petit péché-mignon ; bien qu’il ne fasse plus de basket, il continue de s’entraîner quotidiennement pour s’entretenir et garder une activité physique régulière ; la natation est son nouveau sport de prédilection ; il a peur bleue de devenir père et pourrait s’en passer pour le reste de sa vie ; loin d’être un gros fumeur, il a malgré tout toujours un paquet de cigarettes à portée de main pour pouvoir décompresser rapidement en cas de situation stressante ou qui lui échappe.