Music is medicine > Julai

Cette rupture tu ne l'avais pas du tout vu venir. Tout se passait tellement bien, comment tu aurais pu. Le peignoir ouvert parce que tu ne t'es toujours pas habillé, tu joues quelques notes sur ton clavier. Tu comprends ses raisons, et au fond tu sais qu'elle a raison. C'est vrai, par amour pour elle t'était prêt à renoncer à beaucoup de choses comme à accepter beaucoup de chose. La preuve avec cet enfant que vous avez cru que vous alliez avoir. Elle n'a pas envie de te changer ou d'avoir l'impression de t'imposer des choses, tout comme t'aurais pas voulu ça pour elle non plus. Vous n'avez pas les mêmes objectifs de vie. Elle est prête à devenir mère et à se marier là où toi ce ne sont pas du tout tes priorités. Tu soupires. Ça ne rend pas les choses moins difficiles pour autant. De savoir que vous avez de bonnes raisons de vous séparer. Ça fait mal. Chaque fois que tu poses les yeux quelques part tu peux voir vos souvenirs s'animer. Ça paraît peut-être excessif. Dit comme ça on pourrait croire qu'elle a quitté ce monde mais non. C'est juste votre relation qui est morte. C'est tout récent, mais elle te manque déjà. La chaleur de sa peau te manque quand t'es dans ton lit, son odeur.. Son regard magnifique.. l'entendre rire.. Ta gorge se serre. Ça te fait mal d'y repenser alors que ce ne sont que des bons souvenirs. Mais te dire que c'est terminé, que ce ne sont justement, plus que des souvenirs... t'as le cœur qu'en pleure. Et puisque tout chez toi te rappelle votre histoire tu décides finalement de bouger. Le but est d'accorder une pauser à ton cœur et ton esprit, du moins essayer. Tu prends une douche et tu enfiles pantalon et chemise histoire de te donner de l'allure. De paraître. Peut-être que faire croire que tout va bien te permettra d'y croire aussi, qui sait ? Tu te coiffes et tu sors de chez toi pour aller au parc du quartier. Un peu de nature ne peut te faire que du bien après tout. Mais en avançant dans celui-ci une mélodie parvient à tes oreilles. Tu reconnais aisément les sonorités du violoncelle. Musique mélancolique qui te renvoie finalement tout droit à ce que tu vies. Tu décides de te rapprocher du son. Après tout, jusqu'ici, c'est la façon la plus douce que tu as eu de penser à ta rupture. Quel n'est pas ta surprise quand tu reconnais le visage du musicien. Comme si tout se reliait. Un ex qui te fait penser à une autre. Ton passé prend toute la place aujourd'hui. Mais Jules n'est pas qu'un ex. Vous êtes resté en bon termes grâce à vos passions communes. L'une d'elle étant la musique. Ne voulant pas l'interrompre tu t'assois dans l'herbe, après avoir vérifiée qu'elle soit sèche, et tu l'observes. Tu l'écoutes surtout. C'est tristement beau.

Devient ainsi l'ode à laquelle il peut se raccrocher, dans un cœur souffrant de la peine causée par une rupture amoureuse. Elle fait toujours mal, elle prend toujours trop de place, et j'en suis un réceptacle digne pour comprendre ce que ressent l'être peiné, assis dans l'herbe non loin de moi. Sans imaginer les grossiers démons qui l'assiègent, les notes s'envolent dans une mélancolie liée à la majestuosité de la noirceur qui nous enveloppe. La vie est à la fois belle et triste. Comme mon esprit le souligne, ni pessimiste ni optimiste, car la balance reste constante, chaque événement de la vie remplissant l'un des bols pour la faire pencher. Je suis l'instrument d'une mélancolie palpable, ce soir. Le musicien aux doigts accablés, les cordes vibrant dans un air morose. Quelques passants s'arrêtent. Un couple se serre l'un contre l'autre, s'arrêtant seulement quelques minutes avant de reprendre leur marche. Mes yeux bleus fixent sans indiscrétion, se baissent pour se perdre dans les mouvements du bras et du poignet, jusqu'à se fermer dans une contemplation vide, un néant derrière les paupières. Je me suis installé ici parce que j'aime le parc, la nature m'appelle ; moins que la mer, mais elle m'appelle tout de même. Elle est douce, même si elle peut être très dangereuse. Son chant nymphique me rappelle chaque fois que je devrais venir plus souvent. La vie mondaine n'a jamais été mon monde, je n'y ai jamais trouvé de confort. L'archet continue de caresser les cordes du violoncelle, la mélodie mélancolique s'étire encore de longues minutes. La présence est ressentie, devinée. Je sais qui est assis non loin, mais il ne me dérange pas. L'amitié règne après une relation qui a échoué. Bien sûr, il y a eu des peines, mais le chagrin n'a pas tout envahi, car aujourd'hui l'amitié est roi. Je finis par laisser la dernière note s'éteindre doucement sur une octave grave, puis j'appuie l'index sur les cordes pour calmer les dernières vibrations, et j'étends l'une de mes jambes restée trop longtemps pliée dans la même position. Je pose le haut du violoncelle contre mon épaule, ma joue caressant le bois, mes yeux, presque de la même couleur que ceux de mon invité surprise, captant ses iris. «— Et si...» Je souris doucement, car je ne suis pas naïf, loin d'être stupide pour ne pas connaître Kai, pour ne pas distinguer le bleu de son âme dans les profondeurs de ses yeux. «— Tu me disais ce que je peux faire pour toi...?» Jouer une nouvelle mélodie ? Parler ? A-t-il besoin d'un câlin ? D'une épaule sur laquelle pleurer ? Je ne saurais le dire, car cette réponse, c'est lui et lui seul qui la possède. Je ne peux rien faire sans son aide, ici et maintenant. Mais je veux faire quelque chose, c'est évident. L'ami est en détresse, et je peux – presque – la toucher.

Tu fermes les yeux par moment, pour te satisfaire uniquement de sa mélodie. C'est fou le pouvoir de la musique. Ce pouvoir qu'elle a d'appuyer ou ça fait mal comme d'apaiser. D'éveiller les souvenirs. Parfois de faire rêver aussi... Tu rouvres les yeux pour les reposer sur lui. Tu sais qu'il t'a vu. Après tout, tu n'es pas caché, il lui a suffi de relever les yeux. Et quels yeux.. Il est beau Jules. Il est de ceux qui ont la beauté des divinités grecques. Difficile d'oublier pourquoi t'as crushé sur lui à l'époque quand tu le vois comme ça. Et si tes sentiments ne se sont pas développés dans le sens où tu l'aurais voulu, ça n'a jamais rien changé au fait que tu le trouvais séduisant. Et aussi plutôt chou dans ses réactions la plupart du temps. Il est très différent de toi, et de tout évidence, c'était ce qui te plaisait en lui. Le morceau fini inévitablement par arriver à sa fin et vos regards se croisent enfin « Et si... » tu hausses un sourcil. Est si ? « Tu me disais ce que je peux faire pour toi...? » un léger souffle amusé s'échappe de tes narines et un petit sourire étire tes lèvres malgré tout "Ça se voit tant que ça ou t'es juste aimable ?" pourtant t'as tenté de le dissimuler. De faire allusion. Mais Jules n'est pas juste un inconnu que tu croises comme ça. Vous avez tout de même partagé suffisamment de moments intimes pour qu'il soit capable de décrypter tes émotions un minimum. "Tu as déjà fait quelque chose pour moi avec ce que tu viens de jouer, toujours aussi doué" finalement c'est une bonne chose que tu le croises ici, même si t'étais partis pour te vider la tête tout seul. Tu fronces les sourcils sous la réflexion "J'me rends compte que je t'ai jamais demandé comment t'avais vécu notre rupture à l'époque ?" bon les conditions n'étaient pas les mêmes qu'avec Darcy et toi mais qui sait ? Peut-être que ça pourra t'aider, au moins un peu. Enfin... tu ne penses pas qu'il y ait vraiment de méthode miracle pour se remettre d'une rupture, après tout, toutes les relations sont différentes et chaque personne réagie différemment également. Mais tu te dis que y'a peut-être des astuces qui peuvent aider quand même, ou simplement que ça te fera réfléchir à des choses auxquelles t'avais pas pensées. Voir les choses sous un autre angle.