Success is the child of audacity ((Lysander & Marnie))

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

« Pourquoi tu doutes alors que tu étais déterminée lorsque tu nous en a parlé il y a quelques jours ? » Le regard de Marnie se relève sur Louisa, sa petite sœur, installée dans le canapé tout en attendant une réponse de sa part. Réponse qu'elle est incapable de lui donner pour la simple et bonne raison qu'elle n'a pas la moindre idée de pourquoi est-ce qu'elle a une légère appréhension alors qu'elle était prête à sortir de l'appartement il n'y a même pas cinq minutes. « Je suis sûr qu'il va adorer ce que tu fais. » Elle pince les lèvres en un léger sourire alors qu'elle s'avance pour faire une accolade à son père, soutien infaillible dans toute cette histoire de photographie. Même s'il a eu des moments compliqués à vivre et qu'il a eu du mal à tenir sa petite famille à bout de bras, il n'a jamais manqué d'attention par rapport à leurs envies et aspirations. Il est le premier à la pousser pour qu'elle se lance, mais pour l'instant, ses préoccupations sont ailleurs. Alors pourquoi est-ce qu'elle s'apprête à aller toquer, avec culot, sans y avoir été invité, à la porte du studio de Lysander Bradshaw ? Elle ne sait pas, n'a pas vraiment réfléchi avant de se mettre cette idée en tête mais elle est bel et bien là. Photographe qu'elle suit depuis des années, qui lui a donné l'envie de se lancer là-dedans, il lui semble être la personne idéale pour avoir un premier avis sur les clichés qu'elle prend depuis longtemps maintenant.

Finalement, c'est après avoir pris une profonde inspiration qu'elle s'est retournée pour rejoindre la porte d'entrée et quitter son chez elle, le pas rapide pour s'empêcher de faire marche arrière. Elle n'avait rien à perdre mais tout à y gagner, pas vrai ? Il lui aura fallu marcher quelques longues minutes, book en main, avant de pénétrer dans le quartier de Fremont et une fois sur place, son regard se perd sur ce qui l'entoure avant qu'elle ne repère l'endroit qu'elle cherche. Elle sait que son studio est intégré à son habitation et la dernière des choses qu'elle souhaite est de le déranger alors si elle voit que c'est - malheureusement - le cas, elle tournera les talons pour courir loin s'en aller en lui présentant des excuses qu'il trouvera certainement ridicule à côté du fait d'avoir investi sa propriété privée. Et c'est sûrement à cause de ce scénario qu'elle met un certain temps avant d'appuyer sur la sonnette près de la porte mais une fois que c'est fait, elle se redresse et arbore son plus joli (et naturel) sourire, dans l'espoir que ça fasse passer la surprise de voir une inconnu se présenter devant sa porte.

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

Marnie avait beau être de nature plutôt réservée, dans le sens où elle se faisait généralement toute petite pour éviter d’attirer le regard ou l’attention sur qui elle était, sur ce qu’il se passait dans sa vie privée, elle n’hésitait que rarement à suivre son instinct lorsque ce dernier lui mettait en tête de faire quelque chose et aujourd’hui, après avoir réfléchi quelques jours, elle s’était décidé, même si elle avait eu besoin d’un dernier coup de boost de la part de son père et sa sœur.

Elle avait passé toute la route à réfléchir à la façon dont elle se présenterait à ce professionnel de la photo. Mais existe t’il une bonne façon de faire quand on déboule à l’improviste chez quelqu’un qu’on ne connaît pas, pour espérer être écouté et, peut-être, conseillé ? Elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’elle attendait de cette entrevue mais elle sait que ce monde là fonctionne aussi beaucoup avec le bouche à oreille alors, comme on dit : qui ne tente rien n’a rien. Elle ne pourrait pas s’en vouloir de ne pas l’avoir fait. Il valait mieux voir les choses comme ça, pas vrai ? Les secondes lui paraissent longue alors qu’elle a laissé son doigt annoncer sa présence en appuyant sur la sonnette et elle s’apprête à faire demi-tour, estimant qu’il n’est pas là, quand elle entend la porte s’ouvrir et que Lysander Bradshaw apparaît sous ses yeux. Premier constat : il est bien plus beau en vrai que ce qu’elle a vu en photo. « Bonjour, je peux vous aider ? » Elle ouvre la bouche, légèrement décontenancé avant de se reprendre. « Bonjour, je… hm, je m’appelle Marnie et ça va probablement vous paraître bizarre mais… » Elle décolle son book de son buste, le tendant vers lui. « Je suis une grande admiratrice de ce que vous faites et j’aimerai, si vous le voulez bien et que vous avez le temps, avoir votre avis sur ce que je fais. » Elle lui sourit, espérant qu’il ne prenne pas mal qu’elle se soit déplacée jusqu’ici pour ça. « Mais je peux repasser plus tard, ou un autre jour… ou jamais, si ce n’est pas votre genre de faire ça. » Aucun doute qu’elle allait éviter de parler de ce moment de gêne qu’elle vient de vivre lorsqu’elle allait raconter à sa famille comment ça s’était passé.

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

C'était compliqué de se présenter face à quelqu'un qu'on ne connaît pas, pour en plus lui présenter quelque chose qu'il n'a pas demandé à voir. Ca comporte des risques, comme celui de se faire envoyer bouler, celui de peut-être se rendre compte que la personne qu'on admire tant n'est pas celle qu'on pensait qu'elle était. C'est aussi se mettre à nu, d'une certaine manière. Parce que la photographie peut être considéré comme quelque chose de relativement intime. Marnie capture toujours quelque chose qui lui parle, qui la touche, qui a une importance. Bien que son domaine de prédilection soit la photo culinaire, elle possède un tas de photos de pleins de choses différentes. Aussi bien des paysages, que des focus sur certains points en particulier, des portraits de gens qu'elle aime ou même d'inconnus pris sur le fait, dans un moment de bonheur ou, moins joyeux, un moment empreint de tristesse. « Eh bien enchanté, Marnie. C'est la première fois qu'on me fait ce coup-là. J’avoue que tu as pas mal de culot. » Sans vouloir se jeter de fleurs, elle était plutôt d'accord avec lui. Du culot, il en fallait pour oser se pointer comme ça, dans un but bien précis, mais si on laissait la peur nous guider, on avait de grandes chances de ne pas avancer. Oser, c'est toujours ce qu'elle s'est promis de faire. Le mot d'ordre qui dicte ses initiatives lorsque ces dernières pop dans sa tête d'un seul coup, ou après de longs instants de réflexion. « Dis-moi honnêtement. Tu penses que ça vaut le coup, que je jette un œil à ton book ? Qu’est-ce qu’il y a dans tes photos que je ne verrais pas ailleurs ? » A nouveau, sa bouche s'ouvre puis se referme, parce qu'elle ne s'attendait pas à recevoir une question digne de celles qu'un employeur pose lors d'un entretien d'embauche mais finalement, ça ne la surprend pas le moins du monde. Il n'avait sûrement pas envie de perdre son temps avec quelqu'un qui fait des photos de tous les jours avec son portable - bien que ces derniers semblent être plutôt perfectionné en terme de qualité d'image aujourd'hui. Mais elle ne se démonte pas. De toute façon, elle est là, alors autant en profiter. « Oui, je pense que ça vaut le coup. » Manquerait plus qu'elle lui dise que non et qu'elle se dénigre. « Je photographie avec un vieil appareil photo argentique. Pas les très très anciens mais il date de pas mal d'années quand même et rien que pour ça, vous devriez regarder. Le rendu est loin d'être le même que ceux qu'on peut obtenir grâce aux numériques d'aujourd'hui... même si vous devez déjà le savoir. » Il est quand même photographe professionnel, pas comme si Marnie avait quoi que ce soit à lui apprendre après tout. « Mes photos ne sont pas parfaites, je le sais, mais je trouve que c'est ce qui les rends belles et particulières. » Puis, chaque artiste avait sa patte, sa propre façon de capturer un moment bien précis. Elle n'avait aucune idée de si ça lui aura donné l'envie de se montrer curieux mais elle n'avait pas grand chose de plus à dire pour se vendre de toute manière.

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

« Eh bien, Marnie, tu as toute mon attention. Entre, on serait beaucoup plus à l’aise à l’intérieur pour regarder ça. » Compte tenu de son visage qui prend une expression bien différente de celle qu'elle arbore depuis qu'il lui a ouvert la porte, il n'est pas difficile de constater qu'elle ne s'attendait pas le moins du monde à ce qu'il l'invite à l'intérieur pour discuter plus en détail de photographie. Bien sûr, c'était son but premier en venant jusqu'à son studio mais elle avait naïvement pensé qu'il se contenterait d'observer son book sur le pas de la porte et qu'elle repartirait avec sa carte de visite et un "appelle-moi pour qu'on prenne un rendez-vous" qui permettrait de juger en personne de son talent (ou non-talent) dans le domaine. « Et bien, merci. Je... merci. » De nouveau ce léger bégaiement qu'elle ne contrôle pas, parce qu'elle est surprise et décontenancé l'espace de quelques secondes, juste le temps nécessaire à son cerveau pour comprendre ce qu'il se passe.

Elle pénètre à l'intérieur et se dirige instantanément vers le canapé sombre qu'il lui indique, posant les fesses sur ce dernier alors que son regard scanne la pièce et ce qui se trouve autour d'elle. Typiquement le genre d'endroit qu'elle aimerait pouvoir posséder un jour. Son propre studio serait la cerise sur la gâteau mais elle n'est pas stupide, elle sait combien elle risque de devoir travailler encore avant d'en arriver à ce stade. Parce qu'il ne suffisait pas d'avoir un endroit où prendre des photos, il fallait aussi la clientèle qui allait avec. Et pour l'instant, elle n'avait ni l'un, ni l'autre. « Installe-toi. Je te propose dans un premier temps de me présenter quatre photos et pourquoi tu penses que ce sont celles qu’il fallait me présenter. » Est-ce qu'elle vient de s'empêtrer dans un entretien d'embauche là ? Elle l'observe s'asseoir à son tour, sans rien dire. « Je préfère te prévenir, il est possible que mon avis soit très tranché et pas du tout tel que tu l’espères, mais je vais me montrer aussi honnête que possible. Les personnes qui pensent qu’elles ont quelque chose à raconter en photos sont nombreuses, celles qui ont vraiment quelque chose sont bien plus rares. Je ne suis pas du genre à mâcher mes mots, lorsqu’il s’agit de mon métier. » Un doux sourire se forme sur ses lèvres alors qu'elle hoche la tête, signe qu'elle a parfaitement compris et intégré ses mots. « Pas de problème, j'imagine que c'est le jeu quand on vient se présenter à un professionnel. » Puis tout avis était constructif, non ? Récupérant son book, elle ouvre ce dernier pour l'arrêter sur une photo gastronomique. Pas transcendant mais c'est ce qu'elle aime, ce qu'elle préfère faire. « Je sais qu'elle n'a probablement rien que vous n'ayez pas déjà vu mais c'est avant tout ce que je préfère photographier. Parce que la disposition des aliments peut être délicate, et un plat peut être aussi parlant qu'une peinture. » Mais peut-être n'y avait-il que les passionnés de cuisine qui étaient capable de le reconnaître. La suivante est une photo de sa petite soeur, Louisa, lors de l'une de ses chimios. « Cette photo est loin d'être la plus joyeuse de tout mon panel mais je l'adore. C'est ma petite sœur et j'ai eu envie de capturer ce moment là parce qu'alors qu'on était tous autour d'elle, au bout de notre vie, elle ne m'a jamais paru aussi forte qu'à ce moment là. Elle est occupée de se battre et pourtant, plutôt que de laisser sa maladie l'abattre, elle sourit. Elle rayonne plus que toutes les personnes qui se trouvent autour d'elle... » Une légère pointe de tristesse pointe dans sa voix et elle secoue la tête avant d'en sélectionner deux autres qu'elle lui montre. Celle d'un paysage, l'océan et toute l'immensité qui lui fait face, qui l'entoure, l'horizon dont on ne voit pas les limites, parce qu'il n'y en a pas, finalement. Et pour la dernière, il s'agit d'une photo de Jules qu'elle a prit il y a peu de temps, alors qu'il était dans sa bulle, en train de jouer du violoncelle alors que le jour était en train de se coucher. On peut apercevoir un couple l'observer, main dans la main, alors que lui ne fait même pas attention à ce qu'il y a autour de lui. Elle aime cette photo, elle la trouve tout simplement belle et c'est pour cette raison qu'elle lui présente. « Je n'ai pas la prétention de dire que vous devez me laisser une chance ou peu importe quoi d'autres, mais ce sont, parmi toutes, mes favorites et je pense qu'elle reflète assez bien ce que je suis, ce que j'aime faire ressentir, ou essayer ne tout cas. »

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

La photographie était une mise à nu totale du point de vue de Marnie. C'était permettre aux autres de voir à travers les yeux du photographe et ressentir ce qu'iel a ressenti en prenant le cliché en question. La jeune femme n'avait pas pour habitude de parler photos avec son entourage. Josh aimait ça aussi mais elle ne le voyait plus et plutôt mourir - avec un peu d'exagération - que de faire semblant de rien pour parler de sa passion avec son frère. Elle garde bien souvent ça pour elle, parce que c'est comme son échappatoire, ce qui lui permet de s'évader de ce quotidien qui la bouffe petit à petit, d'années en années. C'est l'une des rares choses qu'elle est encore en mesure de gérer sans qu'il y ait trop de surprise pour venir l'entacher. « Je suis peut-être parfois un peu plus dur que certains de mes collègues, mais tu n’entendras rien qui ne soit pas justifié, au moins. » Elle hoche la tête à ses mots, souriant également, parce qu'elle peut capter la sincérité dans sa voix et puis, il inspirait une sympathie naturelle. Bien sûr, tout le monde avait son côté plus dur, surtout lorsqu'il était question de travail, mais la pression ressentie quelques secondes auparavant avait très vite disparue pour laisser place à tout autre chose. Elle n'a pas besoin de réfléchir beaucoup pour savoir quelles photos mettre en avant, comme si elle les avaient déjà préparés mais non, c'est uniquement parce que de toutes celles qu'elle a prise, elles ont toutes une explication, une histoire. En fait, c'est surtout que ça le représente elle et que ça lui semble être une bonne idée de le faire la découvrir par ses clichés favoris. Un deux en un, en quelques sortes.

Elle ne s'attend à rien de particulier quand elle termine ses explications. Enfin, bien sûr, elle s'attend à une réaction mais pas forcément à un enthousiasme exagéré, parce que ça serait faux. Elle sait qu'elle n'est pas parfaite et qu'il y a des choses à revoir mais c'est aussi pour cette raison qu'elle est ici aujourd'hui. Parce qu'avoir l'avis des siens, c'est bien, mais ça ne vaut pas un œil expert avec l'objectivité qui va avec. « Tu as bien choisi, elles sont toutes … Parlantes. Pour te faire mon retour, je trouve la première photographie un peu trop classique, scolaire. Elle n’est pas mauvaise, mais il aurait peut-être fallu lui apporter un petit quelque chose pour lui donner un effet un peu plus prononcé. La seconde, celle de ta sœur, est sublime. Forte et douce à la fois, les émotions passent facilement. C’est un cliché qui vaut de l’or, parce qu’il est sensible et représente ta famille. Tu dois profiter de prendre ce genre de clichés souvent, parce que ce sont de fantastiques souvenirs, crois-moi. J’en ai fait des caisses et je ne m’en lasse pas. Des milliers de petits moments. » Encore une fois, Marnie hoche la tête, signe qu'elle comprend et intègre ce qu'il lui dit. Elle s'attendait à ce type de commentaire concernant la première photo, parce qu'elle même sait qu'elle n'a rien de particulier, c'est très classique. « Le paysage est lui aussi un peu classique mais met bien avant la qualité de tes réglages. Quant à la dernière photo, combien de temps as-tu observé cet instant avant de le prendre ? Elle est belle, elle dégage quelque chose. Il y a de la sensibilité dans cette photo. » Elle repose les yeux sur cette dernière photo, un doux sourire étirant ses lèvres alors qu'elle vient, du bout du doigt, caresser la silhouette de Jules avant de hausser les épaules. « Je ne sais pas trop. C'est toujours un moment hors du temps lorsqu'il joue alors on se laisse facilement transporter par le moment. J'aurais adoré pouvoir en profiter jusqu'au bout mais ça méritait d'être photographié pour que le moment perdure même une fois terminé. » Il lui suffisait de regarder la photo pour entendre à nouveau la mélodie s'échapper du violoncelle. « Je pense qu’avec un peu plus d’expérience et peut-être un côté un peu moins scolaire, tu peux vraiment sortir de très jolis clichés. Tu as appris seule ? » Elle est contente de cette première conclusion, ça doit d'ailleurs se lire sur son visage et un soupir de soulagement lui échappe alors qu'elle referme son book, le tenant contre ses genoux avant de lui répondre. « Oui, toute seule. C'est un domaine qui m'a toujours profondément attiré et pour des raisons personnelles, mes parents n'ont jamais pu m'offrir un appareil digne de ce nom. Celui que j'utilise a été trouvé sur une brocante, c'est mon tout premier. J'avoue que c'est sentimental, j'ai du mal à passer à un plus récent même si j'en ai reçu un nouveau il y a quelques mois. » Elle secoue la tête en se rendant compte qu'elle s'étale sur des détails dont il doit se foutre royalement. « Et mon envie de faire de la photo s'est intensifié quand je me suis rendue à l'une de vos expositions. Attention, je ne suis pas une fan obsessionnel qui va venir vous harceler pour un peu d'attention mais avoir votre avis était important pour moi. » Ils n'ont pas énormément d'écart d'âge mais néanmoins, ça n'empêche pas l'admiration.

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

Qu'est-ce qui pouvait bien découdre de ce moment ? Marnie n'en avait pas la moindre idée et pour être honnête, elle pourrait totalement se contenter des ces quelques compliments encourageants et de l'avis constructif dont il lui fait part concernant les photos choisies et montrées. Elle n'était pas de ceux qui cherchaient forcément quelque chose en plus. Elle n'était adepte du donnant-donnant. Rien n'obligeait Lysander à lui faire part de quelque chose, après tout. « La photo rend bien hommage à ce moment, en tous cas. Elle a été bien prise. Il y a une délicatesse dans tes portraits qui est très intéressante. Ils parlent presque. Tu t’en sors bien avec ce genre de moments. » Elle ne peut que sourire, parce que ça fait toujours quelque chose de savoir qu'on parvient à faire ressentir quelque chose à l'aide d'un cliché. Encore plus quand ce n'est pas sa spécialité (si tant est qu'elle puisse en avoir une à son niveau) mais peut-être devrait-elle changer son fusil d'épaule et continuer sur cette lancée ? La photographie culinaire c'est chouette mais est-ce que c'est suffisant pour pouvoir réellement vivre de tout ça ? Elle a tout le temps d'y penser et de cogiter grâce à ce qui va ressortir de ce rendez-vous improvisé. « Ravie qu'elle plaise. Je l'ai montré à ma famille mais bon, je ne suis pas certaine de leur objectivité. » Mais elle ne pouvait pas leur en vouloir, même si leurs avis étaient influencé par l'amour qu'il lui portait. Elle pourrait demander à Joshua pour un avis plus objectif, plus tranché, mais il était hors de question qu'elle se rabaisse à aller voir son frère pour ça, d'autant plus qu'elle était sûrement plus expérimenté que lui à l'heure d'aujourd'hui.

« Eh bien Marnie, je suis content de savoir que j’ai peut-être déclenché une jolie vocation chez toi. Je pense qu’avec un peu de temps, tu pourrais tout à fait faire une carrière en photographie. Et j’espère que mon avis t’auras convenu. » C'était plus que le cas, oui et elle hoche la tête en réponse, ne l'interrompant pas alors qu'elle a bien compris qu'il n'a pas terminé. « Ton premier appareil reste très correct. Ton rendu est joli. Certains le recherchent dans leurs retouches. Ce n’est pas une mauvaise chose de le garder. Mais je pense que tu devrais commencer à profiter d’un objectif plus récent. Il y a quelque chose à faire, avec tes photos, mais ça va demander de pouvoir faire des choses plus fines, et peut-être un peu de retouches. » Son regard se baisse un instant sur son book, bien consciente que son appareil, celui avec lequel elle a fait ces dernières, va devoir laisser place à du neuf, du plus récent, pour qu'elle puisse avancer et s'améliorer. « J'imagine que le moment est venu de passer au plus moderne, oui. Il va me falloir un peu de temps pour le prendre en main convenablement mais ça devrait le faire. » Elle avait foi en elle et c'était rare que ce soit le cas. Ou plutôt, c'était rare qu'elle le dise à voix haute, qu'elle s'octroie ce droit là, celui d'oser rêver et voir loin pour elle-même et non pas pour les autres. « Je vais te laisser une carte de visite. Je serais assez curieux de voir ce dont tu es capable avec un peu de travail de post-traitement sur tes fichiers bruts. J’expose en juin. D’ici là je vais être pas mal occupé, mais si tu as besoin d’un conseil, tu peux me contacter. » Marnie récupère la carte et l'observe quelques secondes avant de relever les yeux sur lui, reconnaissante de voir qu'il se tient à sa disposition en cas de besoin. « Je vous enverrai mes premiers tests, ça me permettra de savoir réellement le niveau auquel je me situe. » Elle n'avait jamais vraiment traité des photos, les laissant bruts et même pour les quelques rares prises avec l'appareil reçu à Noël, elle n'avait jamais prit le temps de le faire, aimant le côté naturel qui pouvait en ressortir mais il était clair que c'était nécessaire pour pouvoir se faire un nom. « J’aime beaucoup ton univers, Marnie, ainsi que le fait que tu aies osé venir jusque chez moi. C’était une première, mais je ne suis pas déçu de la découverte. Je pense que je pourrais t’apprendre deux ou trois choses qui pourraient t’être utiles si tu voulais faire de la photographie plus qu’un loisir. Comme tu peux le constater, j’ai un studio complet qui va être moins occupé pour les prochaines semaines. Je te propose de venir profiter de la lumière pour faire quelques tests photo, voir ce qu’on peut sortir avec tes deux appareils. Il y a assez de place pour que tu fasses tes expériences pendant que je serais occupé aux tâches administratives qui ne vont plus pouvoir se différer. Ce que je te propose, c’est une collaboration. Je te laisse profiter des lieux et je t’apporte mes conseils quand tu en as besoin, pour te permettre d’évoluer. De mon côté, j’attends un avis extérieur de ta part si je le sollicite et un petit coup de main quand tu es là. Rien de dingue, que des choses qui devraient être dans tes cordes si la situation se présente. » Son regard s'ouvre un peu plus alors qu'elle considère la chose. Ou plutôt, qu'elle tente d'assimiler tout ce qu'il vient de lui dire. Elle qui ne possède même pas l'ombre d'un studio se retrouve avec la possibilité de pouvoir en utiliser un et pas n'importe lequel. Un studio professionnel. Aucun doute qu'elle a bien fait de prendre son courage à deux mains pour venir jusqu'à chez lui. C'est une aubaine, probablement une opportunité qui ne se représentera pas et pas de doute que si elle laisse passer cette chance, elle ne sera pas en mesure de revenir en arrière. « Tu peux bien sûr ne pas être intéressée, mais sache qu'il n’y a aucune arnaque dans ma proposition. Je pense juste que bien accompagnée, tu peux faire quelque chose d'encore mieux, et je crois que je peux t'y aider. Si tu as des questions sur ce que je te propose, n'hésite pas. » Ses lèvres s'ouvrent mais aucun son n'en sort. Elle hésite entre crier de joie (mais ça serait un peu excessif) et fondre en larmes (ce qui serait tout aussi excessif) mais les opportunités positives pour elle sont tellement rares qu'elle s'en retrouve touchée et retournée lorsque c'est le cas. Puis, on parle de sa passion là et ce n'est pas quelque chose qu'elle néglige. C'est un rêve qu'elle ne s'autorise plus à avoir depuis plusieurs années maintenant. « Je... et bien, je ne sais pas trop quoi dire si ce n'est merci ? » Un léger rire lui échappe alors qu'elle se redresse, comme si ça allait suffire à lui redonner une certaine contenance. « Je ne pensais pas que je repartirai d'ici avec une proposition comme celle là, quelques conseils tout au plus mais ça me touche beaucoup. » C'était bien là la preuve qu'il croyait un minimum en ses capacités parce que sinon, quel intérêt pour lui de lui prêter son studio ? D'autant plus qu'il ne la connaissait ni d'Adam ni d'Eve. « C'est d'accord. Enfin, je m'en voudrais de refuser et je sais qu'on me tirera les oreilles à la maison si je le fais alors... est-ce que ça fait un peu trop scène de film si je vous dis que je ne vous décevrai pas ? » Comme quand l'un des protagonistes se retrouve à devoir gérer un tas de responsabilités suite à la mort de quelqu'un de plus puissant hiérarchiquement parlant ? Bref, elle s'égare.

|	Success Is The Child Of Audacity  @Lysander Z. Bradshaw

« Même si je ne suis pas forcément fan de ce moyen d’apprentissage, sache que tu trouveras sûrement des vidéos sur youtube qui pourront t’expliquer les réglages de base pour ton appareil en particulier. Ça ne fera pas tout, tu devras apprendre à le connaître, mais ça pourra au moins te permettre de comprendre ce que tu modifies à chaque fois que tu touches à un endroit en particulier. » Marnie ne peut que sourire légèrement, parce qu'elle ne peut que se mettre à sa place et comprendre qu'on ne puisse pas être sensible à tout ce que l'on peut trouver sur internet. C'est une solution de facilité, si on peut appeler ça comme ça. A l'époque, il fallait se débrouiller sans avoir la possibilité de trouver des réponses en vidéo. Aujourd'hui, tout le monde - ou presque - peut s'improviser apprenti photographe juste en étudiant ce qu'il trouve sur la toile. N'importe qui peut s'octroyer le travail d'autres personnes aussi mais ça, c'est un autre débat. « J'irai jeter un coup d'œil alors, même si je pense qu'il n'y aura rien de tel que d'apprendre à l'apprivoiser moi-même, en testant encore et encore. » C'est ce qu'elle avait fait lorsque ses parents lui avaient offert son premier appareil. Certes, c'était difficilement comparable puisqu'il avait bien moins de fonctionnalités que le dernier cri qui est posé dans sa chambre mais elle n'en restait pas moins une débutante de chez débutante, sans la moindre base alors forcément, il lui avait fallu travailler pour arriver à un résultat à peu près satisfaisant. « Je suis assez curieux de voir à quoi tu arriveras, mais je pense qu’avec un peu d’entraînement ça pourra être très bien. » Carte tenue précieusement entre ses fins doigts, elle y voit là une opportunité qu'elle n'aurait même pas pu frôler du bout des doigts si elle n'avait pas prit la peine de se déplacer et d'agir sur un presque coup de tête. « Je l'espère aussi. » Est-ce qu'il sous-entendait croire en ses capacités ? Elle n'avait pas envie de trop s'avancer au risque de se tromper. Pire, que le karma ne vienne se charger de son cas et lui remettre les pendules à l'heure, comme il aime le faire avec sa famille de façon régulière ces dernières années. Ne jamais crier victoire trop vite, elle le sait. Et si sa carte était déjà quelque chose de grandiose pour elle, la proposition qui suit l'est encore plus et lui coupe l'herbe sous le pied. D'une façon positive, cependant. Elle en reste muette pendant plusieurs secondes - ou minutes - pas certaine de la réaction à adopter pour lui faire comprendre à quel point elle peut être reconnaissante et, en même temps, ne pas donner l'impression qu'elle venait ici avec une idée en tête, parce que c'est loin d'être le cas. « Ce n’est rien. L’espace va être inoccupé et je n’aime pas quand mon univers est trop calme, dis-toi que ça nous arrange tous les deux ? » Elle hoche la tête, incapable de se départir de son sourire. « J’ignorais moi-même que j’allais te faire ce genre de proposition, mais je pense que c’est un arrangement qui nous conviendra à tous les deux. Mais tu as le temps d’y réfléchir si tu en as besoin. Tu peux me rappeler, si tu veux. » Peut-être qu'elle devrait, comme il lui conseille, prendre le temps d'y réfléchir, peser le pour et le contre, même en parler avec son père, recueillir son avis mais elle n'a même pas besoin de lui confier ce qu'il se passe ici pour savoir qu'il sera le premier à la pousser à accepter. « C’est très film, en effet. Je suis ravi que tu acceptes, je pense qu’on pourra monter un bon partenariat. Tu verras vite que je suis quelqu’un de pragmatique. Peut-être que certains résultats seront décevants, ça ne veut jamais dire que tout est à jeter. Dans ces cas-là, on redémarre et on fait fonctionner les choses. Il y a une solution à tout. » « Merci, encore une fois. Et même si ce partenariat n'en reste qu'à ce stade, je suis sûre que je ressortirai de tout ça avec des nouvelles acquisitions. » Loin d'elle l'envie de lui jeter des fleurs mais il est, à ses yeux, l'un des meilleurs alors forcément, son avis est biaisé par tout ce qu'elle a vu de lui au fil de ces dernières années. Pas vraiment objectif, sûrement, mais elle ne pourra qu'en ressortir avec plus de connaissances sur le sujet. « Je te laisserais me contacter pour me prévenir quand tu veux passer tester tout ça en fonction de tes disponibilités. » Elle allait devoir voir avec son emploi du temps pour pouvoir caler quelques moments lui permettant de venir ici, ça n'allait pas être facile mais elle tenait bien trop à tout ça pour envoyer valser cette opportunité. « Je cumule deux boulots alors je vais regarder tout ça à tête reposée et je vous recontacte pour qu'on puisse s'arranger. » Pour l'instant, elle allait se contenter de partager sa joie avec ses proches. Aucun doute qu'ils allaient être heureux pour elle. Heureux de la voir faire quelque chose pour elle, pour une fois.