Baby, there is no other superstar ft. Lysander

(#) par **Shin Kim** Lun 1 Avr 2024 - 4:26

31 janvier 2024, au crépuscule.

T’as emménagé dans un appartement du quartier le jour précédent et plutôt que de t’habituer à ton nouveau « chez toi », te voilà dehors à arpenter le parc tout proche. Il faut dire que tu sous-loues l’endroit, plus pratique et intime que l’hôtel, parce que tu as décidé de rester encore au moins quelques semaines. Tu n’avais pas grand-chose à ranger ; t’es arrivé aux États-Unis avec une seule valise et tu passes ton temps à racheter des vêtements plutôt que de laver ceux que tu possèdes déjà. C’est comme ça que tu as terminé chez Upcycle Me, d’ailleurs, et rencontré December.

T’as l’esprit occupé par le mignon petit blond. D’ici quelques semaines, tu apprendras qu’il est ton cousin mais à ce moment-là, tu l’ignores encore et tu fantasmes largement. Qui pourrait te blâmer ? Vous seriez merveilleux, ensemble. Tu vois d’ici les clichés de rêve, voilà quelqu’un digne d’être en représentation avec toi…

En parlant de clichés, t’entend le clic caractéristique d’un appareil photo. Le soleil est en train de se coucher, la lumière décline et joue dans le paysage. T’as été suivi et traqué par la presse pendant des années alors certains bruits traversent même tes pensées perdues. Tu repères rapidement le photographe et tu lui souris, bon prince. Personne ne t’a reconnu à New-York, ni ici, tu commençais à te dire que décidément, les Américains n’avaient aucune culture, aucun goût, mais voilà enfin quelqu’un qui rattrape l’honneur de son pays.

Sur un coup de tête, tu t’approches. T’as un peu de temps devant toi et ça te manque d’être le centre de l’attention.

— Ne soyez pas timide comme ça, j’ai toujours un peu de temps pour la presse. Vous voulez que je pose ?

Clin d’œil charmant et charmeur, t’es bien loin d’imaginer que tu te gourres complètement…

@Lysander Z. Bradshaw

(#) par **Lysander Z. Bradshaw** Mar 2 Avr 2024 - 9:44

@Shin Kim & @Lysander Z. Bradshaw

« Baby, there is no other superstar »

31 janvier 2024 – crépuscule

Magnolia, un joli soir de janvier. Le temps était sec, sans nuage. La journée avait été superbe. Les couleurs qui se dégageaient du ciel m’avaient inspiré toute cette journée. Dès l’aube, dans un parc forestier, même s’il avait fait frais. Dans la journée, j’avais installé mon bureau face au soleil chez moi, pour travailler sur quelques retouches. Le projet juin 2024 avançait doucement, mais sûrement. Il me restait un nombre assez important de photos à retoucher, puis tout le travail de sélection, d’impression sur toile, d’harmonisation, enfin, il me restait un temps important à y consacrer, et je devrais m’investir au maximum à chaque seconde que j’allais passer sur mon projet, mais comme toujours, cette période de création me faisait un bien fou.

La lumière déclinait lentement quand je sortis le nez de mes retouches. Une photo ressortait particulièrement du lot, une composition de neige, de gui et de lumière du soir de noël. Celle-ci trouverait sûrement une jolie place dans l’exposition. Pour les autres, c’était moins évident de prime abord, mais combien de fois j’avais fini par changer d’avis lors de la sélection ? Sublimée par son voisinage, une photo pouvait simplement, parfois, se révéler. Je pris le temps de m’étirer un peu. Les couleurs du soir commençaient à tourner, et elles s’avéreraient fantastique, à n’en pas douter. Bien qu’ayant déjà sorti l’appareil dans la journée, l’envie me prit de recommencer, de me rendre dans un parc, en ville, pour peut-être capturer la prochaine pépite de ma série sur la vie quotidienne. On ne savait jamais quand le cliché parfait ferait son apparition. J’avais vérifié mon sac à dos photographique avant de me mettre en route, devant les yeux de malheureux de Fenrir, mon chien, qui sentait bien qu’il allait rester là.

« Je reviens vite mon grand, on se rattrapera sur ta balade de ce soir, mais faut que je bosse un peu. »

Le chien soupira de manière théâtrale, et je quittais mon logement, verrouillant derrière moi. Je laissais mes pas me guider, ne sachant pas réellement où je voulais me rendre, mais connaissant si bien Seattle pour y avoir passé quasiment une vie entière. Plus de vingt ans que j’arpentais la belle cité émeraude. Je ne fis donc pas tant que cela attention à mon chemin, entendant sur mon passage les cloches chanter les quarts d’heure dans le brouhaha d’une fin de journée. Mes pas finirent par m’emmener sur Magnolia, au Discovery Park. Je l’arpentais habituellement plus l’été, lorsque les gens affluaient pour leurs vacances, ou lorsque les fleurs distillaient leur parfum et servaient de repas aux papillons et autres petites productrices de miel. Mais en cette soirée d’hiver, le lieu dégageait un charme tout particulier.

Je m’installais rapidement sur un banc proche, inoccupé, pour sortir mon appareil du sac et commencer à faire mes premiers réglages, par rapport à la luminosité si spécifique de ces crépuscules d’hiver. Ce ciel, presque blanc, aux reflets rougissants, avec une légère brume qui apparaissait, cela promettait des clichés sublimes. Une fois prêt à shooter au passage, je remis le sac sur mes épaules avant de partir à la recherche d’une première inspiration. Le lieu risquait d’en regorger, mais je savais pertinemment que pour dix photos prises, une seule serait peut-être à la hauteur de mes attentes. Je pris quelques clichés, des passants, de cette lumière fascinante. Puis, au hasard de mes pas, une composition intéressante se proposa. Assis sur un banc, la mine pensive, pas du tout réceptif à ma présence … Cette silhouette se détachait particulièrement bien dans son environnement, avec des couleurs de ciel juste somptueuse en arrière plan.

Avec le bon réglage, les bonnes retouches, elle aurait assurément de quoi être une bonne photo en couleur. La basculer en noir et blanc relèverait de l’hérésie. Je pris le temps de faire ma mise au point, mon cadrage, et appuyai sur le déclencheur. L’obturateur émit ce son qui le caractérisait, et je sus que la photo était prise. Je pris le temps de la regarder, pour vérifier sa netteté. J’adorais toujours ce moment suspendu, pour vérifier si le résultat se révélait à la hauteur de mes ambitions. Cela faisait également partie du plaisir de ce métier. En entendant quelqu’un parler proche de moi, je relevais le nez de la photo, avant de comprendre qu’il s’agissait de mon modèle improvisé, et qu’il m’adressait la parole. Je ris légèrement, amusé par la situation. Il m’avait sérieusement pris pour un paparazzi ? Celle-là, c’était une première assez amusante. Forcément, j’étais intrigué par cet interlocuteur inconnu.

« Navré, vous faites erreur. Je ne travaille pour aucun service de presse. Seulement pour mon propre compte. Mais on dirait que vous avez l’habitude d’avoir affaire à eux ? »

(c) DΛNDELION

(#) par **Shin Kim** Mar 2 Avr 2024 - 16:45

Tu tombes assez vite de haut en comprenant que l’homme qui vient de te photographier n’est pas du tout un paparazzi mais bien un photographe ordinaire… qui n’a aucune idée de qui tu es, bien entendu. Ô rage Ô désespoir ! Pendant quelques secondes, tu y as cru. Tu as pensé que tout n’était pas définitivement perdu dans ce pays.

— Quand on est célèbre, on a cette habitude.

Tu réponds en anglais, avec cet accent coréen qui te trahit et te stigmatise en tant qu’étranger. Tu n’en as pas honte, tu as la chance d’appartenir à la classe sociale supérieure : celle des artistes au portefeuille bien fourni. Celle des héritiers prestigieux, aussi, bien que tu aies été rayé de l’arbre généalogique. Mais bon, cet homme n’en sait rien et n’a pas besoin de le savoir.

Et tu es célèbre, c’est un fait. Tu l’as été, du moins… En Corée, tu l’es toujours, il suffit de regarder ton nombre d’abonnés sur Instagram (qui certes baisse de mois en mois mais c’est un détail). Tu vas reprendre tout ça en main, t’es sur la bonne voie. T’as des projets avec December, t’as pas subi de crise dépressive depuis ton arrivée à Seattle, rien n’est perdu…

— Alors vous photographiez des gens au hasard dans la rue ? Juste pour le plaisir ?

Tu questionnes, curieux, creuses un peu, parce que tout n’est pas perdu. Peut-être que cet homme n’a rien d’intéressant à t’offrir ou peut-être, justement, qu’il cache son jeu, exactement comme toi. Ce n’est qu’en creusant un peu que tu le découvriras, tu tâches donc d’être aimable, charmant, le temps d’achever de le jauger, de savoir si tu perdras ou non ton temps. T’as l’œil, tu vois bien qu’il utilise du matériel d’expert. Il doit y avoir une bonne raison à cela, vu son coût.

@Lysander Z. Bradshaw

(#) par **Lysander Z. Bradshaw** Mer 3 Avr 2024 - 6:47

@Shin Kim & @Lysander Z. Bradshaw

« Baby, there is no other superstar »

31 janvier 2024 – crépuscule

Cette rencontre s’avérait pour le moins surprenante. Le moins que je puisse dire, c’est que je ne m’imaginais pas une seconde confondu avec un paparazzi, mais, enfin, ce n’était sûrement pas le pire qu’on aurait pu me dire. Surtout, on ne va pas se mentir, je ne connaissais pas ce jeune homme, qui se disait assez célèbre pour être poursuivi avec assiduité par la presse à scandale. Car on n’allait pas se mentir une fois de plus, les photos prises par ce genre de personne finissait souvent dans la presse à scandale, bien que pas toujours pour des titres si scandaleux que ça. L’idée de vendre mon travail pour des ramassis de ragots pareils ne m’avait jamais traversé l’esprit. Je crois que j’aurais encore préféré terminer mes études et partir travail dans la compagnie familiale, à la limite.

Son accent le trahissait, lorsqu’il parlait. Peut-être présumait-il un peu de sa célébrité, ici, aux États-Unis. La notoriété ne traversait pas toujours les frontières, malgré le talent. Ou alors présumait-il totalement de sa célébrité, après tout, je ne le connaissais pas, mais je n’avais pas non plus l’audace de prétendre connaître toutes les personnes qui se voulaient célèbres. J’eus un sourire en coin, plus charmeur que moqueur, avant de répondre.

« Oui, j’imagine que les flashs deviennent une seconde nature, à force d’être suivi. »

Moi-même, reconnu dans mon métier et par les personnes qui pouvaient graviter autour de cette univers, j’avais parfois le droit à mon lot de photos pour les revues, les magazines, les journaux. La plupart du temps, pour promouvoir une exposition ou mettre en avant une œuvre de charité. Ça n’arrivait pas tous les 4 matins, mais c’était déjà arrivé plusieurs fois quand même. Je n’étais pas forcément le plus à l’aise du monde dans ces moments-là, bien plus à l’aise de l’autre côté de mon objectif.

Visiblement, mon interlocuteur était curieux. Ce n’était pas toujours un vilain défaut, contrairement à ce que disait l’adage. Je pris le temps d’éteindre l’appareil, conscient que la lumière déclinait trop vite pour continuer au-delà de cette conversation les prises de vue telles que je les imaginais. Il faudrait donc attendre un autre de ces délicieux soir d’hiver pour parvenir à capturer de nouveaux moments. Je répondis, après un très léger temps.

« Non, il s’agit de mon métier, en réalité. Je photographie autant les gens que les paysages, que ce soit ici à Seattle ou aux quatre coins du monde. »

J’étais souvent en voyage. Que ce soit dans des lieux reculés de l’Asie ou de l’Amérique du Sud, par exemple, pour mettre en exergue les difficultés liées au réchauffement climatique, à la déforestation, sur les populations qui voyaient leur mode de vie disparaître petit à petit. Enfin, il ne s’agissait là que d’un exemple. Quand la cause me parlait, si j’en avais la possibilité, j’y allais, donnant de mon temps et de ma personne sur place, avant de rentrer avec des clichés pour mettre en avant aux yeux du commun des mortels la situation. J’avais l’argent et la reconnaissance professionnelle qui me le permettait, je n’allais pas m’en priver.

Ce fut à mon tour, de me montrer curieux. Peut-être bien que mon interlocuteur était extrêmement célèbre, dans son milieu et dans son pays d’origine. Mon œil entraîné le détailla en un très bref instant, loin d’être insistant, mais c’était une véritable déformation professionnelle que de chercher le détail qui créait l’instant. Il avait un visage délicat, un corps qui paraissait svelte. Aucun doute que son physique devait intervenir, dans sa renommée. Mais elle pouvait venir de bien d’autres choses également. J’étais naturellement poli, alors après qu’il se soit intéressé à moi, j’allais lui rendre la pareille de m’intéresser à lui. Après tout, si nous étions chacun connu dans notre domaine, lui non plus n’avait visiblement aucune idée de qui j’étais.

« Vous évoluez dans quel domaine ? »

(c) DΛNDELION

(#) par **Shin Kim** Mer 3 Avr 2024 - 10:23

Tu acquiesces brièvement. Oui, tu as l’habitude des flashs et contrairement à beaucoup de célébrités, tu n’as aucun problème avec. Tu aimes qu’on te suive, qu’on te traque, qu’on regarde chacun de tes gestes, qu’on l’analyse. Tu as besoin de cette attention, c’est presque maladif chez toi et c’est d’autant plus vrai depuis que tu as quitté la Corée.

Tu questionnes donc l’inconnu qui ne se fait pas prier pour parler de son métier de photographe professionnel. Il s’intéresse aux gens comme aux paysages, ici comme ailleurs dans le monde. Encore un voyageur ! Décidément, tu les attires comme des mouches. Tu te demandes s’il connait Justin (comme si tous les accros aux voyages se connaissaient entre eux…) et ce qu’il peut y avoir de si intéressant ailleurs pour le préférer à ici. Une réflexion hypocrite et vide de sens puisque tu es toi-même parti ailleurs…

— Je vois. Et vous photographiez juste comme ça ? Ou vous en faites quelque chose ?

Tu es quasiment bilingue anglais mais tu ne saisis parfois pas toujours les subtilités de langage. Comme il t’a dit plus tôt ne pas travailler pour la presse, tu te demandes comment il peut être photographe professionnel, comment ça peut être son métier. C’est vrai que tu as déjà entendu parler de galeries dédiées à la photographie mais tu n’es pas très au courant de tout ça, alors tu questionnes, ça ne te coûte rien. Tu demandes un peu d’éclaircissement.

Lui aussi est curieux. Parler de toi, c’est ce que tu préfères, alors tu n’hésite pas davantage :

— La musique, plus spécifiquement la danse. Je viens de Corée. Je visite pour découvrir de nouveaux horizons.

Ton histoire varie toujours un peu, en fonction des circonstances et d’à qui tu la sers. Tu ne vas pas avouer la vérité d’entrée de jeu, tu ne vas pas expliquer à un parfait inconnu que ton grand-père t’a banni de ta famille ultra riche et puissante, que tu as quitté ton groupe après avoir blessé ton meilleur ami en lui explosant le genou, mettant un terme à sa carrière (du moins le croyais-tu mais il a guéri ce salaud de traitre) et que tu as fini aux États-Unis parce qu’autrement, tu allais te faire tuer. On t’a d’ailleurs invité à te suicider pour rendre service à tout le monde et malgré ta dépression sévère, tu t’obstines à vivre pour les emmerder.

Ouais, ça risquait de jeter un froid. Sans compter que ça ne se mariait pas très bien avec ton image toute dorée.

@Lysander Z. Bradshaw

(#) par **Lysander Z. Bradshaw** Jeu 4 Avr 2024 - 19:42

@Shin Kim & @Lysander Z. Bradshaw

« Baby, there is no other superstar »

31 janvier 2024 – crépuscule

Il avait évidemment cette attitude à l’aise qu’ont les gens habitués à être la cible de l’attention des autres. Une attitude que je connaissais bien et dans laquelle je baignais littéralement depuis pour ainsi dire toujours. Mes parents étaient de ces gens, par l’importance de leur travail. Nous avions été, mes frères, sœurs et moi, élevés pour être de ces personnes également. Je l’étais aussi, avec mon travail. Souvent entouré, scruté, écouté. Le moindre faux-pas me ferait assurément une bien mauvaise presse. J’avais pris l’habitude de cette attitude lisse et polie. C’était devenu une seconde nature qui s’accordait bien avec mon caractère naturellement calme. De fait, faire la conversation était facile, et avec les inconnus, je n’étais pas rapidement susceptible. Je répondis donc à la question de mon interlocuteur.

« J’expose, la plupart du temps. J’alerte aussi, parfois. Je donne un peu de mon temps et de mon métier aux bonnes œuvres. Je travaille aussi parfois sur commande, quand les gens ont besoin de mes services. »

Mettre en exergue le monde qui nous entourait était un travail de tous les instants. Que ce soit pour partager les joies et le beau, comme les peines de populations de l’autre bout de la terre qui voyaient la destruction de leur mode de vie. Mon métier pouvait être mené au gré de mes inspirations, de mes idées, de mes ressentis, et il apportait une création constante qui était agréable. Une nouveauté de chaque instant, un apprentissage renouvelé à chaque journée. Toujours d’autres opportunités de découvrir, des paysages, des cultures, des visages. Me montrer curieux envers mon interlocuteur me permit d’apprendre plusieurs choses. Son origine, son métier. Ce n’était pas étonnant avec son joli minois.

« Et jusqu’à présent cette différence de culture vous plaît ? Ce doit être … dépaysant ? »

(c) DΛNDELION

(#) par **Shin Kim** Lun 8 Avr 2024 - 7:56

T’écoute, tu retiens. Et te retiens, surtout, de bailler quand il parle d’alerte, de bonnes œuvres. Décidément, tous les hommes que tu rencontres en ce moment ont cette obsession du caritatif. T’as fait ta part, lorsque tu étais au sommet, parce que c’est ce que tu devais faire mais en toute honnêteté, autrui t’importe peu. Tu penses à toi en premier et t’es persuadé que la plupart des gens sont comme toi, même s’ils n’osent pas se l’avouer. Tes oreilles se rouvrent toutefois à la mention de « service ». T’aurais bien besoin de te refaire quelques photographies plus professionnelles, ne fut-ce qu’avec les vêtements de December que tu es censé promouvoir. Et pour réattirer du monde sur ton compte, empêcher la fuite des abonnés qui ont l’outrecuidance de se désintéresser de toi, surtout maintenant qu’il est clair que tu ne fais pas partie de la nouvelle ère de DARE.

— Très.

Très dépaysant et oui, plaisant. Tu rencontres des gens intéressants qui arrivent à te procurer du plaisir en s’occupant de toi comme tu le mérites. Ils flattent ton ego, le malmènent juste ce qu’il faut pour que ça reste intéressant. T’as pas connu d’épisode dépressif sévère depuis ton arrivée à Seattle mais t’es pas naïf au point de te croire guérit. Tu sais qu’à un moment donné, tu vas replonger. Tu ignores juste quand, et pour quelle raison. T’es bien décidé à retarder ça le plus possible.

— Je découvre de nouvelles choses chaque jour. Comme aujourd’hui, je découvre un photographe. Vous avez un compte Instagram où je peux voir ce que vous faites ?

Parce que pour ce que tu en sais, il enjolive ou n’est pas plus doué qu’un autre. T’es trop égocentrique pour perdre du temps bêtement si la personne n’en vaut pas la peine (selon tes critères complètement biaisés…). N’importe qui se serait intéressé à son travail caritatif mais c’est plus une tare qu’une qualité, pour toi. Ça en dit long…

@Lysander Z. Bradshaw

(#) par **Lysander Z. Bradshaw** Mar 9 Avr 2024 - 6:27

@Shin Kim & @Lysander Z. Bradshaw

« Baby, there is no other superstar »

31 janvier 2024 – crépuscule

Si je n’étais pas la personne la plus expressive de l’univers, j’étais par contre parfois un fin observateur. Ça allait de paire avec mon métier, cette façon que j’avais de capter l’essence des choses. Ou capter le manque d’intérêt de mon interlocuteur pour une partie de ce que je lui racontais. J’étais pourtant loin de m’en vexer. Même si mon orgueil pouvait parfois prendre quelques coups dans le nez, le fait que cet inconnu ne s’intéresse pas outre mesure à mes actes ne me dérangeait pas. Je ne le connaissais pas, je ne le recroiserais peut-être pas. Mais ça ne m’empêchait pas de dire ce que j’avais à dire. Puis de dévier habilement la conversation vers quelque chose qui, peut-être, lui siérait mieux.

Enfin, visiblement, tout ne semblait pas dénué d’intérêt, pour lui. En tous cas, ses découvertes de la culture américaine ne semblaient pas le désintéresser. Pour avoir visité pas mal de pays, aucune culture ne se ressemblait, et j’étais souvent fasciné par ces différences qui rendaient chacun de mes voyages uniques. Même dans les grandes villes, où tout s’était plus ou moins lissé d’un pays à l’autre, les choses étaient parfois si différentes. Pas étonnant, donc, qu’il découvre de nouvelles choses chaque jour. Un sourire un brin amusé étira mes lèvres à sa mention de ma découverte. M’était avis qu’il avait appris à manœuvrer habilement son monde pour arriver à ses fins. J’ignorais desquelles il s’agissait, mais j’avais l’habitude de me mouvoir dans le monde des paillettes depuis assez longtemps pour le sentir. Et décider de laisser la manœuvre suivre son cours.

« Oh, oui, j’ai ça, mais je dois avouer que je ne mets pas grand-chose dessus. J’ai d’autres réseaux plus professionnels. Un instant. » Et ça ne me prit réellement qu’un instant, de prendre une carte de visite dans l’une des pochettes de mon sac professionnel. Toutes mes coordonnées professionnelles, dont mes réseaux, étaient au dos. « Tenez, si ça vous intéresse un peu, mes différents réseaux sont dessus. »

Et si ça ne l'intéressait pas, que grand bien lui fasse, car j'avais bien assez de contacts et de clients pour n'avoir besoin de courir après personne, et avec l'exposition de juin approchant à grands pas, j'aurais encore une fenêtre de mise en avant qui allait s'ouvrir. Bref, je ne risquais pas de manquer de travail pour le moment !

(c) DΛNDELION

(#) par **Shin Kim** Mar 9 Avr 2024 - 15:43

Tu prends la carte qu’il te tend et tu détailles les différents réseaux dessus. Tu en connais certains, d’autres non. Tu n’es pas un professionnel de la photographie. Pour toi, le monde passe par Instagram. Le monde civilisé, en tout cas… Quoi de plus important que la visibilité ? Les likes ? Les commentaires instantanés ? T’es accro, depuis aussi longtemps que tu t’en souviennes. T’es obsédé par les chiffres…

— Je vais jeter un œil !

Tu ranges la carte dans une poche de ta tenue et tu souris pour agrémenter ton remerciement. Tu ne mens pas, tu regarderas véritablement ses réseaux et en fonction, si ça t’inspire, si ça te plait, tu reprendras contact. Après tout, il y a aussi ces informations, sur le recto de la carte. Tu pensais susciter davantage l’intérêt mais s’il préfère les paysages à ta perfection… disons que tu ne peux lutter contre un tel mauvais goût. Tu le plaindrais presque !

Au final, tu ne sais plus exactement s’il te photographiait ou non, si c’était un accident ou s’il préférait t’avoir de loin. La façon dont a tourné la discussion n’a pas éclairci ce point mais comme il n’en a pas profité pour demander davantage… T’es trop égocentrique pour t’imposer. Si on ne vient pas te chercher, tu passes.

— Je vous laisse au paysage, alors. Même si la lumière n’est plus excellente, vous avez peut-être de quoi y palier avec votre matériel.

T’aimes les photos nocturnes, jouer avec le brin de lumière tiré d’un lampadaire, t’amuser avec les ombres. Tu vas peut-être enchaîner quelques selfies dans une composition plus poétique, pensive, t’en sais rien, tu verras bien. Tu le laisses avec un dernier sourire charmant et charmeur, histoire de t'ancrer dans son esprit. L'avenir dira si cette brève rencontre mènera à davantage.

@Lysander Z. Bradshaw

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