Je n'aime pas réfléchir avant de parler, j'aime être aussi surpris que les autres. | Shin & Ember

En te levant cet après-midi-là, t’étais loin de t’imaginer que ta journée prendrait une telle tournure. C’est ton cousin qui a frappé à ta porte pour t’annoncer son existence mais également ton lien de parenté avec December, un créateur adorable sur lequel tu avais flashé et que tu essayais de draguer. Sauf que vous vous êtes connus avant que tu ne rencontres Justin, que tu ne t’affirmes davantage et que tu ne pratiques suffisamment pour tenter quelque chose de concret. Tu as ressenti quelque chose de fort en sa compagnie et tu te demandes maintenant si ce n’était pas cette parenté découverte, si la biologie ne t’a pas jouée un mauvais tour. Si t’as pas tout confondu. Si t’as pas pris l’attirance de deux personnes avec le même sang dans les veines pour quelque chose de plus primaire, pour un désir bassement sexuel.

Quand June part, tu restes un moment debout sans savoir quoi faire de ton corps. T’aurais bien voulu qu’il reste, discuter encore, vider ton sac, mais t’as bien compris que ce n’est pas trop le genre de la maison. Alors tu te tournes vers la seule personne à qui tu ne devrais pas parler dans ton état : December. À cette heure-ci, il est toujours à la friperie, du moins tu le supposes. Jusqu’à quelle heure travaillent les gens normaux ? C’est une réponse pour après ta douche.

T’enfiles des fringues qui ressemblent davantage à quelque chose. Ironiquement, tu mets le pantalon blanc que tu portais le soir où tu as rencontré Minho mais tu n’as pas encore tissé les liens entre eux. T’es trop tourné sur December. Tu gardes ton hoodie doudou, t’enfiles une veste en jeans par-dessus, tes baskets arc-en-ciel et tu hèles un taxi afin de te conduire à Capitol Hill, jusqu’à la boutique « Upcycle Me » où tu es rentré il y a deux mois, par le plus grand des hasards.

Tout ce temps, tu n’arrêtes pas de réfléchir. Tu essaies de trouver des réponses à des questions qui n’en ont aucune. Tu te demandes pourquoi l’Univers a décidé de vous mettre sur la même route, surtout à ce stade de ta vie. Et quand tu pousses la porte du lieu de travers de December, tu tires toujours une drôle de tête. T’as l’air… bouleversé, parce que tu l’es. Par chance, il est là.

— Salut. Je… Est-ce qu’on peut se parler ?

T’es flippant, une partie de toi en a vaguement conscience mais t’as envie de dire trop de trucs en même temps, tu ne sais pas par où commencer. Tu le fixes d’un air bizarre et de le voir en vrai, en face de toi, tu te demandes comment t’as fait pour ne rien remarquer avant.

@December Jones

Tu te laisses tomber gracieusement dans le canapé en velours de la boutique pendant qu’Ember retourne le panneau sur la porte de la boutique, pour indiquer qu’il ferme. Tu refuses le verre d’eau d’un signe de tête, te retenant de demander de l’alcool. Il vaut mieux que tu sois sobre, même si tu te sens fébrile.

— Je ne sais pas trop par où commencer. Tu ne veux pas t’assoir aussi ?

Tu penses que ce serait mieux. En fait, tu ignores comment Ember va réagir. June t’a mis le doute à ne pas le savoir lui-même et tu as un peu peur tout en étant complètement excité. T’as envie que ça se passe bien mais tu ressens comme un vertige. Et si ça se passait mal ? Et si… et si tu le gardais pour toi, au moins un moment ? Non, t’es pas foutu de te taire, tu le sais très bien. T’attends qu’il se décide sur la position à adopter puis tu enchaines.

— J’ai appris un truc de dingue tout à l’heure et je n’arrive pas à savoir quoi faire de cette information tellement c’est impensable, mais je te jure que je ne le savais pas quand je suis entré dans cette boutique au départ. C’est… j’en sais rien, le destin ? Toi et moi, on est cousin.

Voilà, c’est balancé. Un peu violemment, alors tu t’empresses de préciser :

— Mon père est le frère de ta mère, mon nom de famille, c’est Kim. Mais moi aussi j’ai été jeté, comme elle, ton frère m’en a parlé. Il est à Seattle d’ailleurs, il ressemble un peu à un yakuza.

Tu parles vite, ton accent ressort davantage. Tu souris largement, comme si tu venais de lui annoncer une nouvelle merveilleuse. La première partie l’est, du moins à tes yeux. La seconde… même si June t’a dit qu’il ne s’entendait pas bien avec Ember, tu n’imagines pas que ça puisse poser problème.

Oups.

@December Jones

T’as jeté un froid, tu t’en rends bien compte quand Ember perd son sourire puis se relève pour s’occuper les mains. Tu sens une tension chez lui qui épaissit l’air de la pièce. Tu notes de contacter June pour lui dire que la prochaine fois, ses euphémismes, il peut se les carrer où tu penses… D’un coup, ton cousin explose et balance un tas de vêtements sur le sol. T’es frustré pour lui parce que ça ne fait pas de bruit, rien ne se brise, c’est insatisfaisant. Tu te lèves, tu hésites à approcher. En général, tu es celui qui pique la colère, pas l’inverse, tu n’as aucune idée de comment la juguler.

— Il m’a dit que vous ne vous entendiez pas trop mais je ne pensais pas que ça te mettrait en colère à ce point-là. Tu peux m’expliquer ? J’ai déjà remarqué qu’il était hautain, qu’il ne se prend pas pour de la merde et qu’il a l’air d’être du genre à te stalker. Il avait une photo de nous, celle de ton Instagram, agrandie sur du papier glacé, comme on voit dans les séries à la télé. Ça fait soit détective privé soit gars louche. C’est un gars louche ?

Votre rencontre ne remonte pas à longtemps mais tu l’as passé, ce temps, à la rejouer dans ta tête, à analyser la moindre phrase, la moindre attitude dont tu te souvenais, pour essayer de décider ce que t’inspire June Jones. Le problème ? Il n’est même pas resté suffisamment pour commencer une discussion. Tu ne peux pas dire « pour prendre un café » parce que tu n’as toujours aucune idée de comment fonctionne cette machine, mais l’idée est là.

— T’es… fâché contre moi ?

Tu demandes, avec des yeux tristes. Il ne te manque plus qu’un chapeau et tu ferais un parfait Potté. C’est pas vraiment de la manipulation. Juste un peu. T’as réellement peur qu’il soit fâché mais t’as surtout envie qu’il s’intéresse à toi, qu’il se reconcentre sur toi.

@December Jones

T’es soulagé d’entendre qu’Ember n’est pas fâché contre toi. D’autant que, pour le coup, tu dis la vérité : t’étais au courant de rien et aussi surpris que lui d’apprendre votre lien de parenté. Si June n’avait pas joué au stalker, vous auriez pu juste être amis, ou… un peu plus, ouais, si ton plan avait pu aboutir mais le destin s’amuse à te contrarier.

— T’as frappé un policier ?

Tu écarquilles les yeux. Pour toi, d’où tu viens, c’est quelque chose d’inenvisageable même si tu n’es pas exactement l’exemple parfait du gentil garçon. En regardant December, tu ne l’imaginais pas faire preuve de violence et ça t’intrigue, ça te titille même parce que tu ne peux pas t’empêcher de faire un lien avec ton propre cas. Tu te souviens de la bagarre qui a tout fait foirer, du plaisir que tu as pris en entendant le genou de ton meilleur ami craquer, de la peur qui t’a saisi ensuite et de tout ce qui a suivi… Tu t’humectes les lèvres et tu t’obliges à secouer doucement la tête pour te reprendre.

Heureusement, ce que te dit ton cousin t’aide à remettre les pieds sur terre.

— Faut voir. Dans ta famille, il y a toi… T’as l’air plutôt chouette.

Tu souris, encourageant. Tu penses ce que tu affirmes. Vous avez tout de suite bien accroché, tu apprécies son esprit artistique, tu le trouves merveilleusement beau -comme toi-même en fait- ce qui est un grand avantage pour quelqu’un de narcissique dans ton genre. Puis il est adorable, amusant, le courant passe.

— On peut former la famille des parias. Et tu me raconteras pourquoi on déteste June, comme ça on se serre les coudes entre cousins !

June ne t’a pas fait une bonne impression mais là, t’essaies surtout d’assouvir ta curiosité et comprendre un peu mieux les rouages qui t’échappent.

@December Jones

Tu notes de ne pas surprendre Ember quand il est alcoolisé. Tu lui en voudrais, s’il abîmait ton joli visage…

— Je reste sur chouette. Tu peux être chouette et idiot si tu y tiens.

Tu badines et ça fonctionne car il retourne s’assoir à côté de toi.

— Je ne le déteste pas, je te préfère juste. Il a débarqué chez moi en me réveillant, il m’a pris de haut, j’y peux rien, j’aime pas ça… Je n’aime pas être dans les poches des autres.

June représente une autorité, peut-être une menace pour ton ego. Il te rappelle un peu trop ton grand-père et tous les mauvais souvenirs qui y sont associés. D’un autre côté, tu n’es pas contre lui laisser le bénéfice du doute, dans l’optique où il daignerait faire un petit effort… et, bizarrement, tu en doutes. Sait-on jamais, sur un malentendu…

— J’en sais rien, c’est la première fois que ça m’arrive. Je peux déjà te conseiller de ne pas exiger un café et de penser à être poli.

Tu plaisantes, tu essaies de le détendre et tu dois te retenir de passer toi aussi la main dans sa nuque.

— Sois honnête, c’est tout. Que je sache à quoi m’attendre. Tu ne pourras rien me dire qui va me choquer, crois-moi. Vu d’où je viens…

Du moins tu l’imagines mais tu te trompes peut-être, après tout… December aussi, a grandi avec une Kim, et June ressemble à un Kim plus qu’à un Jones. Enfin, tu ne connais pas les Jones, tu trouves juste qu’il ferait la fierté de ton père et de ton grand-père, ce qui est une raison valable pour t’en méfier et pour, de façon mesquine, ne pas lui faciliter la vie. L’avenir révèlera si tu t’es trompé ou non, si tu changeras d’approche… ou non.

@December Jones

Tu as encore mis le doigt sur un sujet compliqué. Là où tu pensais que December se ruerait dans la faille pour descendre June, tu découvres que les choses sont bien plus nuancées que cela. Il y a un passif certain mais pas suffisamment pour que le jeune homme tourne le dos à son aîné. T’as besoin de comprendre pour savoir comment jouer tes cartes mais tu décides de ne pas trop pousser pour cette fois-ci. Tu n’as pas envie de le braquer.

Le sujet change tout seul pour aborder celui de Minho. Deux fois que ce prénom est cité et il te dit quelque chose, t’as l’impression de l’avoir déjà entendu récemment sauf que… là, tout de suite, ça ne te revient pas. À ta décharge, c’est un prénom courant d’où tu viens et tu ne fais pas le lien entre le beau coréen qui t’a chauffé pour mieux te planter là sans trop d’explications. Ton ego t’a contraint à ranger cette histoire tout au fond de toi parce que t’as encore du mal à la digérer.

— Qu’est-ce que tu veux dire, tu ne serais pas là sans lui ?

Ici à Seattle ou en vie de manière générale ? T’es curieux, décidément. T’as envie de comprendre cette toile qui semble se tisser autour de December pour savoir à quel endroit t’y accrocher afin de tisser ton propre cocon. Les métaphores sur les insectes, c’est pas ton truc et t’as pas envie de transformer ton cousin en proie. C’est juste… Tu veux ta place, tu veux une importance et dans l’idéal, tu la veux tout de suite. Gamin capricieux que tu es…

— June en a un peu parlé, de lui. Il doit être spécial.

T’as un ton bizarre quand tu dis spécial. Toi-même tu ne sais pas trop si c’est une insulte ou pas.

@December Jones

Avec ce que raconte December, tu commences à comprendre qu’il a été couvé plus que de raison. Tu ignores pourquoi, à ce stade, et tu ne peux qu’émettre des hypothèses. Toi aussi, t’es l’enfant d’une riche famille influente. Tu connais les menaces qui peuvent peser sur des gens comme toi, comme vous. Il y a les envieux, les jaloux, les revanchards, les opportunités… Personne ne t’a jamais enlevé -et à ce stade tu ne penses même pas à cette possibilité pour ton cousin- mais il y a eu des coups de stress, des menaces voilées. Ensuite, en tant que star, tu as connu ton lot de fans, certains plus respectueux que d’autres, et quelques situations bizarres. Tu sais aussi que quelqu’un t’a surveillé toute ta vie et tu imagines que quelqu’un continue à le faire. T’as cru que June était là pour ça, d’ailleurs. Pour te tuer aussi. Sauf que t’as l’habitude qu’on te regarde, qu’on te jauge, t’y prends même une forme de plaisir malsain parce que t’es au centre de l’attention. Dans ton esprit, rien de pire que l’indifférence…

— Je sais pas, on va pas faire un concours, si ?

Tu ris doucement, pourquoi pas après tout. C’est Ember qui décide.

— Ouais, un verre, c’est une excellente idée. J’offre la première tournée !

Quand on boit à deux, est-ce qu’on peut vraiment appeler ça une tournée ? Comme tu ne connais pas encore très bien Seattle, tu laisses ton cousin choisir l’endroit où vous vous rendez. Pendant qu’il récupère ses affaires, tu continues de parler.

— J’ai le droit de demander pourquoi t’emmener manger une glace, c’est la fin du monde ? Ou t’as pas envie d’en parler ? Parce que du coup, un verre, ça vaut pour une apocalypse ?

Tu ris à nouveau. Tu plaisantes mais t’es curieux, vraiment curieux. Tu pourrais aussi te contenter d’une recherche sur Internet, des fois que l’information s’y trouve, mais tu n’y penses pas encore à ce stade. T’imagines pas.

@December Jones

Tu hoches la tête doucement, décide de ne pas revenir sur le sujet. Tu aurais cherché avec ou sans son autorisation mais tu te réjouis de l’obtenir, tu te sentiras plus légitime, moins… fouille merde. T’es intrigué, si curieux que tu dois te retenir de le faire immédiatement.

— Pas de soucis, je comprends.

Toi aussi, tu as tes traumatismes et tu es bien placé pour savoir que les médias véhiculent souvent des mensonges. Tu trieras en fonction, tu auras au moins une vague idée, quitte à utiliser le numéro de June pour en apprendre davantage. Tes propres horreurs à toi ne sont pas étalées dans la presse et ont une dimension plus psychologique, comme celle des cauchemars. Tu couches à côté d’une pastille de poison, après tout…

Tu le suis après qu’il ait fermé la boutique, tu respires l’air de l’extérieur et tu te rends compte qu’il fait beau en cette fin de journée ; Le soleil brille, comme si l’univers lui-même célébrait vos (re)trouvrailles, ce nouveau chapitre. Tu souris.

— Tu sais je me sens bête de ne pas avoir remarqué quelque chose plus tôt. On se ressemble beaucoup. J’ai été blond à une époque, je suis sûr que si je me teignais les cheveux aujourd’hui, on nous prendrait pour deux frères. On pourrait faire des photos extraordinaires !

Tu t’emballes déjà à cette perspective, fantasmes un peu sans que ça ait une connotation sexuelle. Quoi que… Mais non, là, tu penses aux likes, à la visibilité sur les réseaux, à une possible carrière qui reprendrait non pas dans la danse, plutôt dans le mannequinat. Tu as, après tout, proposé de poser comme modèle pour lui.

— Et se créer une origin story bien à nous. C’est la base pour obtenir la visibilité.

Le talent ne vient qu’après, l’image régit le monde…

@December Jones