What will this new year bring us? |Ft. Isla

❁ What will the new year bring us?
w/  @Yuna Park

Non, ce n'est pas simple de cacher qui on est, même si le déni a aidé pendant longtemps. Mais c'est comme ça qu'elle a grandi, en se cachant, parfois littéralement. Peut-être que si un jour, elle a quelqu'un dans sa vie, elle le fera pour éviter à cette personne de subir la violence des "siens". Pour le moment, tout ce qu'elle parvient à faire, c'est à baisser la tête face à eux.

"J'ai aussi été très focalisée sur mon travail... Ca a été ma seule réelle préoccupation pendant longtemps. Le reste passait après. Ils trouvent toujours ça complètement stupide, mais je m'en fiche.  

Son attirance pour les femmes, c'est depuis qu'elle a rencontré Yuna qu'elle ressort vraiment. Avant, elle ne s'en préoccupait pas plus que ça, trop occupée à travailler. Les quelques relations qu'elle a accepté de vivre lui ont surtout prouvé qu'elle n'avait pas besoin de ça pour être heureuse. Parce que malgré certains traumas qu'elle traîne, elle n'est pas malheureuse. Et Yuna semble approuver le fait que les histoires d'amour sont trop compliquées à gérer... elle préfère draguer de temps en temps, c'est plus facile. Et avec un peu d'alcool dans le sang, c'est vite réglé.

"J'ai jamais bu assez d'alcool pour avoir ne serait-ce que la tête qui tourne un peu. Prendre ma première cuite pour une première visite dans un bar gay, je suis pas sûre que ce soit une bonne idée!" fait-elle en riant un peu. "Mais bon... pourquoi pas. Le bar, je veux dire. Pas la cuite."

Il faut bien se lancer un jour, non? Il n'y a que comme ça qu'elle saura ce qu'il en est vraiment de sa sexualité. Ou alors, elle se résout à finir vieille fille avec des chats. Enfin, non... pas les chats.

"C'est pas que je les aime pas!" réplique Isla quand Yuna montre sa surprise. Elle se redresse, pose son verre sur la table basse et soulève sa manche gauche pour découvrir son bras. Plusieurs cicatrices y sont clairement visibles, dont une qui laisse deviner qu'elle a eu des points de suture. "Souvenir du chat d'une de mes cousines... Il avait développé le syndrome du chat sauvage et j'ai été la première qu'il a attaquée. J'étais ado, mais j'ai eu tellement peur que je suis plus jamais arrivée à approcher un chat."

Elle rabaisse sa manche et se rassoit pour reporter son attention sur le film, dont elle n'a quasiment rien écouté jusqu'à présent, en fait. C'est qui, à l'écran, là?

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Effectivement, Isla gagnerait à s'imposer plus qu'elle ne le fait. Sa gentillesse fait qu'elle est plutôt du genre à se laisser bousculer qu'à bousculer elle-même et souvent, elle préférerait être invisible plutôt que de faire le moindre bruit. Son travail, c'est la seule chose pour laquelle elle sait faire valoir ses envies et ses droits. Elle ne sait pas vraiment comment argumenter là-dessus, puisque Yuna a raison. Elle affiche une moue un peu gênée quand, la conversation déviant sur l'alcool et les conneries du lycée, elle se trouve un peu plus affichée comme la plus sage des deux.

"J'étais pas très dégourdie en classe, j'avais du mal à suivre, mais à part me faire reprocher d'être toujours dans la lune... Non... J'étais plutôt du genre à rester dans mon coin, avec mes livres et mes carnets. J'ai pas trop changé!"  

Il y a bien quelque chose qui l'a profondément marqué, à cette époque. Mais il n'y a que son meilleur ami et ses parents qui soient au courant. Elle se garde de le dire à qui que ce soit d'autre. Hormis ça, elle a toujours été la même, finalement. Elle est restée fidèle à l'enfant, puis à l'adolescente douce et calme qu'elle a été précédemment. Fidèle à elle-même, jusqu'à être fidèle à sa peur des chats, même si oui, c'est vrai, elle n'a juste pas eu de chance. Après tout, c'est vrai qu'il y a aussi des chiens méchants, pourtant elle n'en a pas peur et ce n'est pas Mist qui va dire le contraire, puisque chaque fois que son humaine et Isla se retrouvent, il passe sa soirée à se faire gratter les oreilles devant la télévision. Parlant de soirée, elle accepte la proposition de Yuna d'aller dans un bar LGBT un de ces jours. On est en 2024, il est temps qu'elle parvienne à accepter qui elle est! Même si bon, faire des ravages dès la première fois... ça l'enchante pas forcément. C'est un peu effrayant.

"Il faudra déjà que je sois capable d'aligner trois mots!"

On peut pas dire que la drague soit vraiment son fort, surtout en étant au placard depuis trente ans. Elle tourne finalement son regard vers le film, dont elle n'a strictement rien suivi depuis qu'il a été lancé. Son estomac lui rappelle au passage bruyamment qu'elle n'a quasiment rien avalé de la journée. Il est vrai que, sachant qu'elle passait sa soirée avec Yuna, elle a préféré garder l'estomac prêt à avaler quelque chose d'inhabituel...

"Et si on se commandait des pizzas? Je meurs de faim."

Oui, des pizzas, ça fait un moment qu'elle n'en a pas mangé et ça va très bien avec une soirée TV.

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w/  @Yuna Park

Du temps du lycée, le caractère d'Isla avait été une souffrance. Discrète, effacée, elle avait été victime de harcèlement scolaire. Elle avait tant mal vécu cette période qu'elle n'avait pas souhaité continuer ses études. Elle ne l'a jamais regretté, puisqu'aujourd'hui,  elle vit de sa passion pour l'écriture et le dessin. Mais certainement qu'à l'époque, Yuna ne l'aurait pas regardée. En tous cas, c'est ce qu'elle se dit quand elle lui explique comment elle était plus jeune. Elle est un peu surprise de la réponse de la jeune femme.

"Tu ne te serais pas ennuyée?" demande-t-elle sincèrement.

Elle s'est sentie ennuyeuse plus qu'autre chose à l'époque... maintenant, sa gentillesse et sa douceur sont devenues des forces. C'est grâce à ça qu'elle s'entend si bien avec les enfants et c'est de cette personnalité que sont nés Birdie et ses copains. En revanche, si elle peut affirmer sans trop de problèmes qu'elle a su s'entourer depuis, on ne peut pas dire qu'elle soit dégourdie côté drague. Peut-être que l'alcool aidera un peu... Enfin, elle n'est pas sûre d'avoir spécialement envie de draguer qui que ce soit, au fond. C'est surtout un moyen de passer du temps avec Yuna et peut-être que dans ces circonstances... bah, tu parles, elle aura pas le cran quand même et si elle l'a, est-ce qu'elle a franchement envie que ce soit parce qu'elle a trop bu? En tous cas, la réflexion de son amie la fait rougir.

"C'est, hum... tant mieux." qu'elle bafouille.

Et pour changer de sujet, elle profite que son corps lui rappelle qu'elle n'a rien avalé depuis trop longtemps. L'idée des pizza réjouit Yuna, tant mieux. Isla rit lorsqu'elle annonce qu'elle va choisir ananas en garniture.

"Je préfère l'ananas en dessert... Chèvre miel pour moi." C'est du sucré-salé aussi, c'est dans le thème.

"Bien cuisiné, c'est bon, les choux de bruxelles. Je suis plus légumes cuisinés maison que fast-food... Mais un burger dans un bon restaurant, bien garni et avec une vraie bonne sauce...!"

Bon, ça la nourrit pour deux jours, mais ça, c'est une autre paire de manches.

"C'est quoi ton plat préféré, d'ailleurs? Etant donné que c'est moi qui invite la prochaine fois!"

En espérant que ça ne soit pas un plat typiquement Asiatique parce que bon, là, elle va galérer un peu, c'est pas trop son rayon en cuisine.

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w/  @Yuna Park

Isla a toujours du mal à se dire qu’elle peut réellement être appréciée. Cadeau de sa famille qui ne l’a jamais acceptée dans on intégrité. Ils ont toujours quelque chose à redire, à critiquer à son sujet. C’était pire encore lorsqu’elle était adolescente. Au moins, désormais, elle sait s’entourer et ne se laisse plus marcher dessus par n’importe qui à la moindre occasion - c’est réservé à sa famille. Elle est du coup loin de s’imaginer qu’une relation amoureuse puisse aboutir à quelque chose, encore faudra-t-il qu’elle assume sa sexualité. C’est pas pour demain. Pour revenir dans une discussion plus légère, Isla demande à son amie quel est son plat préféré. Bon d’accord, c’est avec une idée précise en tête: celle de l’inviter à dîner chez elle, de tenter une soirée un peu plus intime que le genre qu’elles partagent depuis quelques mois. Si elle en trouve le courage, tout du moins. La réponse de Yuna ne l’étonne pas trop, que ce soit pour les Burger ou pour les plats de ses parents. L’amour déborde de leur côté, ça se ressent dès que Yuna parle d’eux. Elle est curieuse de les rencontrer, même si elle a un peu la trouille de ne pas être appréciée - bon ok, elle a franchement la trouille même. Isla réfléchit un instant à sa propre réponse. Qu’est-ce qu’elle aime vraiment manger, au juste?

"Je crois que ma préférence va à un bon woke de légumes du jardin… bien assaisonnés, avec une viande blanche. "

Autrement dit, l’opposé du plat choisi par Yuna. Quoique ça puisse très bien aller ensemble, finalement. Un peu comme elles, peut-être? Oh, c’est terrible, qu’importe ce qu’elles font, Isla finit toujours par avoir ça dans la tête.

"Avec plaisir!" qu’elle répond à sa proposition de partager un jour un vrai repas Coréen avec ses parents. "Je connais très peu ce genre de cuisine, en dehors des restaurants… et je fréquente pas tant que ça les restaurants."

Elle est cliché, bon sang. La hippie qui cultive ses propres fruits et légumes, qui va au marché acheter ceux qui lui manquent… et qui peint installée sous les arbres du parc ou qui est plongée dans un livre. Eh ben. Merveilleux d’originalité.

"Tiens, ça peut être une bonne idée pour une de mes futures planches: Birdie découvre une nouvelle culture culinaire. C’est un sujet que je n’ai encore jamais abordé."

Quand on est neuroatypique, ça peut être compliqué de découvrir des nouvelles saveurs. C’est un projet qui peut être intéressant à écrire, d’autant que si Yuna veut bien l’aider à ne pas raconter de bêtises, elle peut se servir de sa propre expérience.

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w/  @Yuna Park

C’est peut-être un peu idiot, mais même si ce n’est pas la première fois qu’elle retrouve Yuna et qu’elle s’est toujours sentie à l’aise avec elle, c’est la première fois qu’elle a l’impression qu’il y a un vrai rapprochement. Elles parlent de leurs familles, Yuna lui propose de rencontrer un jour ses parents autour d’un repas et Isla s’ouvre un peu plus, parlant plus en profondeur de sa situation familiale… Elle apprend au passage que Yuna n’est pas tellement intéressée par une relation sérieuse et ça lui fait mal autant que ça l’arrange, elle a assez peu de risque de la voir s’engager avec quelqu’un d’autre… De fil en aiguilles, la complicité se nous un peu plus, sous le regard intéressé de la boule de poils qui partage la vie de Yuna et qui en profite pour grappiller des câlins. Son amie parle de son envie de retourner à Sokcho. Elle n’a pas la moindre idée d’où ça se situe sur une carte, à part que c’est très probablement en Corée, puisque Yuna est Coréenne.

"Je n’ai jamais voyagé… c’est quel ordre de prix?"

La question n’est pas désintéressée, évidemment. Pas qu’Isla roule sur l’or, mais elle est très économe, elle a de l’argent de côté et c’est peut-être une occasion de sortir du pays avec quelqu’un en qui elle a confiance. Enfin, si les démarches administratives le permettent parce que ça non plus, elle n’a aucune idée de comment ca fonctionne. La culture culinaire étrangère, les voyages… c’est un sujet qu’elle n’a jamais abordé dans ses livres, parce qu’elle n’est pas suffisamment renseignée dessus.

"J’en suis à ma cinquième année avec Birdie. J’ai trop de choses à raconter pour m’en lasser! C’est un peu comme s’il était toujours avec moi, je pioche des idées à droit et à gauche… c’est pour ça que j’ai toujours un carnet avec moi. Et comme je suis seule à écrire mais aussi à travailler sur les illustrations, ça me prends un temps fou. J’ai plus d’idées que de temps!"

Elles n’ont pas vraiment le temps d’en parler plus que la sonnette retentit. Isla sursaute, sensible aux bruits de ce genre et toujours surprise de la rapidité de la livraison. Pendant que Yuna va chercher les pizzas, Isla se relève pour aller chercher carnet et stylo dans son sac, pour noter ses nouvelles idées avant qu’elles ne lui échappent. Elle écrit quelques mots dans un calepin déjà bien garni pendant que Yuna sert le repas. Effectivement, tout le monde est d’accord, ça sent très bon!

"Je ne sais même pas à quand remonte ma dernière commande de  pizza!"

Elle est étrangement enthousiaste à l’idée de mordre dans sa première part. C’est rare que ce genre de repas lui fassent vraiment envie. Alors qu’elle saisit un morceau, son téléphone se met à sonner. Qui peut bien vouloir la joindre en soirée? Elle ignore la première sonnerie, mais il sonne de nouveau. Elle s’excuse auprès de Yuna et se relève pour aller répondre. Ça peut être un ami en détresse. Et égoïstement, quand elle voit le nom qui s’affiche, elle aurait préféré que ce soit ça. Elle prend une grande respiration avant de décrocher.

"Halo, athair... tha mi ag obair, mar a h-uile duine eile -- ach -- chan eil, ach tha mi -- tha, ceart gu leòr, bidh mi ann. Feasgar math." *

Pas besoin de comprendre la langue pour comprendre que ces quelques mots échangés n’avaient rien d’agréable. Quand elle revient à table, Isla n’a qu’une envie: se mettre à pleurer.

*Bonjour, père... Je travaille, comme tout le monde -- mais -- non, mais je -- oui, d'accord, je serai là. Bonne soirée.