Thank you for the music, the songs I'm singing Thanks for all the joy they're bringing. (Ruby)

Thank you for the music, the songs I'm singing
Thanks for all the joy they're bringing.

« Thank you for the music, the songs I'm singing
Thanks for all the joy they're bringing.  »

@Sigmund Kamiński & Ruby

Au premier abord, cela ressemblait à une soirée comme une autre, sur Fremont. J’avais obtenu un petit contrat pour l’été dans un bar, histoire de mettre un peu de musique dans l’établissement certains soirs de la semaine. Un bon vieux classique piano-voix qui allait bien. J’avais carte blanche sur ma proposition musicale, mais elle devait varier assez pour qu’un habitué n’entende pas tous les jours l’exact même musique, et c’était à peu près la seule règle à respecter. Certains soirs pourraient être légèrement thématiques – public plus ou moins âgé, ce genre de choses – mais ça restait des adaptations très faciles à faire. J’étais donc ravie de ce petit contrat qui allait me permettre de ne pas trop réfléchir pour les prochaines semaines à comment j’allais boucler les fins de mois.

Pour évoluer dans ce genre d’environnement, et malgré la chaleur d’un mois de juillet bien avancé à Seattle, j’avais opté pour un short jean simple et près du corps ainsi qu’un chemisier blanc à manches courtes, très fluide et porté large. Afin d’être tranquille avec, j’avais natté l’avant de mes cheveux pour les tirer en arrière, où ils étaient simplement pincés pour pouvoir ensuite reprendre leur droit à la liberté, en une cascade ondulée dans mon dos. Le maquillage pour aller avec était sobre, et élégant. Bref, je ne passais pas mal dans cet univers, assise derrière mon piano et seulement armée de ma voix. Ce soir, il y avait principalement des hommes, et même si l’attention était loin d’être focalisée sur moi entièrement, il y avait suffisamment d’applaudissements pour me faire comprendre que mon travail était écouté et apprécié.

J’étais ravie de pouvoir présenter certaines de mes propres compositions. Après des années à les garder pour moi, les retravailler, les peaufiner, je me sentais enfin prête à les présenter au monde et suffisamment légitime pour le faire. L’accueil n’était pas mauvais, par ailleurs. Mes créations personnelles remportaient le même succès que les reprises que je faisais, ce qui était encourageant. Sans parler de mes proches qui me soutenaient dans mon projet et étaient mes premiers fans – mais je supposais qu’ils n’étaient pas très objectifs. Toujours était-il que je m’éclatais dans ce métier, dans ce contrat, et que les soirs se suivaient mais ne se ressemblaient pas tant que cela.

Le serveur finit par ma faire signe de stopper la prestation. Passée une certaine heure, mon set se terminait et ils optaient pour de la musique beaucoup plus habituelle. Un compte Spotify, et hop, la petite Ruby était remplacée. Mais il fallait avouer que j’avais, dans ces cas-là, joué et chanté plusieurs heures, donc j’étais ravie de m’arrêter. Je prenais généralement un verre, avant de rentrer. Passer la soirée seule avec des inconnus, ça ne m’intéressait pas trop, donc rentrer à la colocation, c’était une bonne chose dans ces cas-là. Ou rejoindre des amis ailleurs … Bref, peu importait, ne pas m’attarder trop longtemps. Je m’étais donc rendue au bar, commandant un gin tonic au passage. Je venais à peine de remercier le barman après l’arrivée de mon verre qu’une voix masculine juste à côté de moi me fit tourner la tête avec un sourire aux lèvres.

« Je suis ravie si ça t’a plu ! » Le vouvoiement ? Je n’aimais pas du tout. À prendre ou à laisser, surtout dans un bar, comme maintenant. Les compliments, j’aimais bien, surtout quand ils étaient mérités. Je n’étais pas spécialement modeste, même si j’avais un ego plus que raisonnable. « Eh bien, oui, ce soir il y avait en partie des créations personnelles. » J’observais rapidement mon interlocuteur, avant de ficher avec aplomb mon regard dans ses prunelles presque noires. Timide ? Jamais. Je penchais la tête sur le côté, avec ma curiosité débordante. Ce visage, il m’était inconnu, pourtant, je venais régulièrement ici depuis quelques semaines, j’avais commencé à repérer certaines tête. « Tu viens souvent, ici ? »

Car évidemment, cette question m'intriguait. Cet interlocuteur inconnu, je l'aurais remarqué, quand même, parce qu'il fallait avouer qu'il était vraiment beau, et comme j'avais des yeux pour m'en servir, je ne pouvais que m'en rendre compte. Je me tournais totalement vers lui, un coude appuyé sur le comptoir, puis un sourire à croquer étira mes lèvres tandis que j'observais mon inconnu sans le moindre complexe. Sacrément craquant dans son genre.

« Je suis Ruby, au fait. Juste si ça peut t'intéresser. »

Je n'étais pas timide pour un sou. Et il n'y avait aucun doute là dessus.

Thank you for the music, the songs I'm singing
Thanks for all the joy they're bringing.

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@Sigmund Kamiński & Ruby

Ce bel inconnu était une nouvelle tête, et j’étais ravie qu’il ait engagé la discussion avec moi. Bien évidemment, comme souvent, je m’étais mise à parler avec lui sans le moindre souci, car j’étais comme ça. Je ne donnais pas de détails sur moi outre mesure, bien sûre, prudent comme je pouvais l’être, mais ça ne pouvait pas m’empêcher d’être le centre de l’attention d’un tel homme. J’eus un sourire en coin en réponse à son clin d’œil, avant de pencher doucement la tête sur le côté tout en parlant de ma musique, de mes compositions que j’avais mises en avant ce soir. C’était une conversation facile et naturelle, pour moi. Et visiblement, ça rendait assez admiratif mon interlocuteur. Car même s’il n’était pas tellement expansif, sa réaction semblait sincère, et ça me touchait un peu, comme à chaque fois que mes compositions plaisaient aux personnes que je croisais. Mon sourire ravi en témoignait. Ce qu’il ajouta me fit rire doucement.

« Eh bien, on devrait sûrement pouvoir s’arranger là-dessus, si ça devait arriver un jour ? »

Ce que j’espérais, mais on ne pouvait clairement pas mettre la charrue avant les bœufs sur ce coup-là. Bien sûr que c’était mon but, ce que j’espérais réussir mais … L’industrie musicale était parfois compliquée et ingrate, donc toute une vie de sacrifice pourrait ne pas suffire pour en arriver où j’espérais réussir. Nous nous observions tous les deux, et ça n’avait clairement rien de discret. Mon regard plus clair dans le sien, presque noir, avant qu’il ne court sur une mâchoire légèrement carrée et couverte d’une barbe légère, toute aussi noire que ses cheveux. Ce charme ténébreux était tout à fait plaisant. J’empêchais mon regard de dévier du visage de l’homme, ne l’empêchant pas, pour sa part, de m’observer à sa guise. J’aimais bien être au centre de l’attention, mine de rien. Un tout petit brin égocentrique sur les bords, mais pas plus.

J’avais fini par me présenter, l’air de rien, histoire de voir si l’homme était un peu réceptif ou non, et sa réponse me tira un sourire, de ce genre de sourire charmeur qui mettait en valeur mes pommettes comme il fallait. J’avais l’air aussi jeune et pétillante que je l’étais réellement, dans ces cas-là. Un petit rayon de soleil. Ou une pierre précieuse, à priori. J’aimais beaucoup cette comparaison, même si je l’entendais très régulièrement. Ça m’allait bien. Précieuse et brillante. Mais mon égocentrisme n’allait pas jusqu’à le préciser, même si c’était tentant. Je battis des paupières délicatement, de manière assez discrète pour ne pas que ce soit ostentatoire. Un peu de tenue et de douceur, tout de même, bien qu’il soit assez clair que mon charme était de sortie, bien qu’encore de manière très dosée.

« Enchantée, Sig. » Cette simple syllabe de son prénom roulait étonnamment, avec mon accent irlandais, même si je n’avais pas cherché à le grossir. Un sourire en coin terminait le tableau. Mes doigts firent tourner doucement le verre que je tenais devant moi. Je le levais un peu. « Pourquoi pas un prochain. » Clairement, je ne comptais pas décliner la proposition, ni écourter la conversation. Pas quand ça se passait bien. Ma voix était à la fois affirmée et douce, un peu rauque d’avoir autant chanté. « Mais j’imagine qu’on peut déjà trinquer à notre rencontre ? » Je m’étais légèrement penchée en avant, présentant mon verre afin de trinquer, me rapprochant juste ce qu’il fallait dans la manœuvrer pour ne pas avoir besoin de parler fort pour nous entendre, sans pour autant l’envahir. Il restait une distance respectueuse entre nos corps. « Je ne t’avais encore jamais vu ici. Pourtant j’y suis régulièrement. Comment j’ai pu te rater jusque maintenant ? » Ouaip. On appelait clairement ça du rentre-dedans, là. Et ça se voyait à l’intensité de mon regard.

Thank you for the music, the songs I'm singing
Thanks for all the joy they're bringing.

« Thank you for the music, the songs I'm singing
Thanks for all the joy they're bringing.  »

@Sigmund Kamiński & Ruby

La conversation était facile, naturelle. Notre regard s’accrochait bien, et clairement ni l’un ni l’autre d’entre nous n’étions mal à l’aise de ce concours d’œillades. Je n’en étais pas à papillonner des paupières comme certaines midinettes, mais ma façon de me pencher un peu en avant vers lui pour le regarder dans les yeux et ciller délicatement, un sourire aux lèvres, donnait le même résultat sans que je ne me comporte comme une gamine amourachée. C’était une réaction un peu plus mature, dirons-nous, sûrement ce qu’il fallait pour ne pas faire fuir directement un homme comme lui – plus âgé que moi, certains signes ne pouvaient guère tromper. Un sourire ouvertement amusé étira plus largement mes lèvres tandis que nous parlions de ma potentielle célébrité d’un jour, et je ne pus m’empêcher un trait d’humour légèrement railleur.

« Ah, car sans autographe je serais si facilement oubliable ? »

Il n’y avait aucune vexation dans ma voix, car j’étais consciente que son attention accrue sur mon regard prouvait que j’avais un minimum attiré son attention. Peut-être pas assez pour lui laisser un souvenir impérissable, certes, mais au moins assez pour lui rester dans la tête quelques jours, et peut-être trouver une excuse pour une nouvelle rencontre. Après tout, ça n’avait rien de désagréable, ce délicat jeu de la séduction qui avait cours entre nous.

Puis il y eut les présentations en bonne et due forme, et ce délicat compliment sur mon prénom, que j’avais pris dans le bon sens. Ainsi que la proposition de m’offrir un verre et, même si l’actuel était bien rempli, j’avais accepté un verre suivant, comme une promesse de faire durer cette rencontre entre nous, cette discussion et ces regards. La situation était agréable. Naturelle et sans le moindre malaise. Son regard noir était peut-être un peu plus sérieux que le mien, bien plus clair et plus pétillant, mais il n’y avait rien dans son attitude qui me donne envie de me redresser et de m’éloigner. J’avais donc porté mon verre pour le faire tinter au bord du sien, avant de boire une gorgée sans le lâcher du regard. Je reposais finalement mon verre sur la table, le faisant tourner du bout des doigts.

Et évidemment, ma curiosité n’attendit pas longtemps avant de refaire surface. Après tout, même si je me produisais régulièrement ici, je ne l’avais jamais rencontré, et ça m’étonnait. Avais-je été totalement aveugle car trop concentrée sur ma relation – ou sa fin, plutôt – avec Sevan ? Ou n’était-il pas un habitué ? Peu importait la réponse, dans le fond. Tout ce que je voulais, c’était savoir pourquoi, jusqu’à présent, j’étais passée à côté de lui. Et sa réponse me fit délicatement pencher la tête sur le côté, un mouvement qui traduisait ma curiosité à son égard. Un rire doux et léger s’échappa de mes lèvres, sincère et non complètement artificiel.

« C’est dommage, de te draper dans les ombres pour passer inaperçu. C’est une véritable perte de ne pas pouvoir te remarquer. » C’était assez frontal, comme compliment, sans l’être trop. Oui, Sig était un régal pour les yeux, le rater était absolument dommageable. Et je n’allais pas me cacher de penser cela. Je n’étais pas de ces filles qui se contentaient de papillonner des yeux en attendant qu’on les drague ; je pouvais être plus rentre-dedans. « Eh bien, je serais ici plusieurs jours par semaine pour tout l’été, donc j’imagine que si tu reviens, on devrait de nouveau se croiser. »

Mon sourire rehaussa mes pommettes, faisant ressortir la délicate fossette de mes joues, tandis que je reprenais mon verre pour en boire une gorgée. En me tournant pour le poser, mon genou nu toucha délicatement celui de l’homme qui me faisait face, et j’observais en coin sa réaction – ou son absence, je m’en moquais un peu, pour le moment. Tant qu’il ne reculait pas avec effarement, tout pourrait me convenir. Puis mon attention revint totalement sur lui, ma curiosité ne pouvant pas rester longuement en veilleuse. Et le questionnement était important, pour le coup, histoire de savoir un peu où je mettais les pieds, pour l’occasion.

« Tu es venu seul, ce soir ? Ou tu attends quelqu’un, peut-être ? »