Insomnia || ft. Elias

Feat. @Elias Solberg
Insomnia

Journée de merde. T’as enchaîné les interventions à la con. D’abord la vieille qui appelle car on lui a volé son chat alors que celui-ci se trouvait sous un meuble chez elle… Ensuite le gérant d’une supérette qui vous demande d’arrêter un gamin qui a volé 3 petits bonbons… Et pour finir, le mec complètement défoncé qui au moment de son arrestation a vidé le contenu de son estomac sur toi. Tu te demandes si parfois tu ne ferais pas mieux de tout abandonner. Mais au fond de toi t’as encore l’étincelle qui t’as mené à te battre pour faire ce métier. Elle ne demande qu’à être ravivée. Tu ne sais juste pas comment faire…
Tu sors de la douche. Une douche salutaire pour retirer cette odeur épouvantable entre alcool et drogue. Ta serviette autour de la taille, tu regardes ton reflet dans le miroir. Tes traits sont tirés et les cernes semblent ne plus quitter ton visage. Tu passes ta main sur cette barbe que tu laisses pousser par négligence plus que par réelle envie d’en porter une, et te mets à bailler. Les trois heures de sommeil de la nuit dernière se font ressentir. Tu céderais bien à une petite sieste mais à quoi bon ? Tu sais très bien que si tu fermes les yeux tu retourneras affronter tes pires cauchemars. Ta psy dit que ça finira par passer mais ça fait déjà un an et ils ne t’ont jamais quitté. Parfois quand la fatigue est trop présente, tu arrives à faire une nuit quasiment parfaite mais c’est rare. Un coup de déodorant et tu sors de la pièce pour te diriger vers ta cuisine. Tu ouvres le frigo pour constater qu’il est vide. Tu soupires et jettes un coup d’oeil à ton salon. Les cadavres des dernières bières que tu as bu se trouvent sur ta table de basse, parmi quelques restes de plats préparés. T’es clairement pas d’humeur à aller faire tes courses maintenant, alors tu choisis une option qui n’était pas dans tes habitudes douze mois auparavant, celle d’aller au bar.
Dix minutes plus tard, t’es dehors. La pluie commence à tomber. Tu rabats ta capuche et commence à marcher dans les rues de Belltown en direction d’un bar dans lequel tu comptes parmi les habitués maintenant. Avant les soirées au bar pour toi c’était des soirées festives, entre amis. Maintenant t’y retrouves souvent seul à essayer d’oublier ces journées de merdes qui s’enchaînent. Perdu dans tes pensées, tu franchis les portes de l’établissement et te diriges vers le comptoir machinalement. Tu commandes une bière. Ton but n’est pas de te mettre minable dès les premières minutes. Une fois ta boisson entre tes mains, tu retournes en quête d’un endroit où te poser. Alors que tu t’apprêtes à te diriger vers un coin de la pièce, ton regard repart en arrière. T’es presque sûr d’avoir croisé un visage connu. Bingo ! Cette tête blonde, c'est pas la première fois que tu la croises dans ce bar. Si vous vous connaissez d’abord du boulot, vous vous êtes retrouvés ici un jour pour fêter une condamnation suite à une enquête sur laquelle vous avez travaillé en commun. Depuis il vous arrive encore de vous y revoir pour discuter de vos vies respectives, pas toujours évidentes. Mais ce soir ce n'est prémédité. Tu fais rouler tes épaules en arrière et te diriges donc vers la table où se trouve Elias. Tu avais prévu de passer la soirée seul, mais après tout, pourquoi ne pas profiter de sa présence pour rendre potentiellement cette journée meilleure qu’elle ne l’a été jusqu’à présent. Posant ta bière sur la table, tu tires une chaise alors que vos regards se croisent.

« Bonsoir Monsieur le substitut du procureur. »
(c) Niagara (fiche) ; ... (gifs)

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Les moments les plus difficiles ont lieu le soir, plus précisément les soirées où Vega travaille en horaire de nuit. Tu sais qu’il préfère et qu’il s’en est un peu empêché durant le mois d’août, peut-être par crainte de ton état mais tu commences à te sentir… Moins mal ? Oui, moins mal, à défaut de mieux.

Deux fois par semaine, tu vas voir la psy détachée au Palais de Justice et vous avancez bien, non seulement sur ton épuisement professionnel mais aussi sur tout le reste, dont le désastre qu’est ta vie privée. Aux yeux du monde, tu nages dans le bonheur, fiancé à un homme extraordinaire qui est parfait pour toi. Dans les faits, c’est effectivement le cas, sauf qu’il y a… le cas Marlon. Ton meilleur ami pour qui tu t’es découvert des sentiments un peu plus qu’amicaux, avec qui tu as déjà fauté à trois reprises, dont deux où tu étais supposé te trouver en couple avec Vega. Vous avez essayé de fonctionner à trois mais vos egos et vos états respectifs l’ont empêché. Deux sur trois qui souffrent de dépression, ça ne pouvait pas fonctionner.

Tu apprends à relativiser, tu essaies de te concentrer sur toi, de ne pas trop ressasser, te rappeler qu’il te manque. Tu avais prévu une soirée série devant Netflix en jouant avec Harvey le furet mais finalement, tu envoies un message à ton petit ami : « Je sors prendre l’air et peut-être boire un verre avec des amis, je te tiens au courant. Je t’aime. » Tu n’as pas envie qu’il s’inquiète mais tu as besoin de t’occuper l’esprit, de ne pas laisser ton cerveau dériver et il dérive clairement devant ce drame sentimental. Pourquoi est-ce qu’il y a des triangles amoureux dans des séries pour ado, bon sang ?!

Tu finis dans un bar de Belltown, évitant le Targy’s pour d’évidentes raisons, autant que tous les autres lieux où tu es connu. Ici, tu risques de croiser un autre avocat ou un flic et ça, tu peux le gérer. Habillé comme à ton habitude en dehors du travail -c’est à dire avec un pantalon troué, un débardeur à l’effigie d’un groupe de metal, des Dock Martens et une vieille veste en cuir qui a connu la guerre- tu commandes une bière et t’installes à une table pour observer le monde vivre et te rappeler comment être sociable. Tu n’avais même pas besoin de faire un effort conscient avant mais là…

Une chance pour toi, l’univers t’envoie un sauveur. En quelque sorte… tu souris largement à Jake.

— Eh, monsieur l’agent ! Ça faisait une paie, comment tu vas ?

Tu te redresses pour lui donner l’accolade, parce que tu es comme ça ; tactile, joyeux, bon compagnon. Tu l’étais, en tout cas, et avec quelqu’un “du boulot”, c’est plus facile de réenfiler ce masque. C’est reposant même. Tu lui désignes la chaise à côté de la tienne et prends le temps de l’observer. Lui aussi, il a pas mal morflé ces derniers mois… Alors ta question est sérieuse, sincère. Tu attends une vraie réponse, ou du moins, tu lui laisses l’espace pour te la fournir s’il le souhaite. Tu ne l’obligeras à rien, mais l’hypocrisie de la politesse… Tu t’en passes. Tu t’en es toujours passé.

@Jacob C. Sutton