A force de me planter je vais bien finir par devenir une fleur. | Benedict & Ember

Benedict & Ember
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Il était rare que je fasse des insomnies, mais quand ces dernières se manifestaient, elles avaient l’insolence d’être bien trop fortes. Efficaces dans cette capacité à me tenir éveillé. Peut-être n’aurais-je pas dû boire se café à dix-sept heures et regarder les photos de mon mariage deux heures après. Pourtant, la fatigue était bien là, elle aussi, mais bien moins combattante que cette insomnie. J’avais beau me tourner dans mon lit en quatre, rien ne m’apportait ne serait-ce qu’un micro-espoir de finir la nuit dans les bras de Morphée. Que l’on ne me reprenne plus, le combo nostalgie et caféine sera désormais interdite dans cette maison. Puis, très rapidement, être plongé dans le noir et le silence de cette maison m’angoissait. Les chats avaient décidé de dormir avec ma fille plutôt que moi —comme si Eloise payait leurs croquettes, un scandale !— et je ne parvenais à songer à autre chose qu’à Alice. Ça m’arrivait, encore aujourd’hui, de l’imaginer en pleine nuit, revenir dans cet espace de lit si vide. Comme un mauvais rêve, un terrible cauchemar où, une fois éveillé, je la reverrai sortir de la salle de bain avec ses bigoudis ou un masque à l’aloe verra. Mais, même dans le noir, même en observant avec persistance la porte, seule l’obscurité en ressortait. Un espoir vain qui, à défaut de me fatiguait me déprimait un peu plus. Et pour contrer cela, je me devais de sortir de ce lit, et réfléchir.

Quitte à avoir l’esprit embrouillé mais éveillé, il était plus pertinent d’être productif. Rapidement habillé, et bien moins élégant que mes standards de jour, je décidais de retourner au second étage de la maison, pour commencer à coudre. Plutôt dans la journée, j’avais préalablement découpé des pièces pour une robe sirène pour une cliente invitée à un gala. Elle souhaitait quelque chose d’élégant, dans la lignée de l’âge d’or Hollywoodien. En sommes, rien de très compliqué mais avec une préparation longue. J’avais un peu plus de trois mois pour cette robe, un délai plus que raisonnable, mais plutôt la robe sera faite, plutôt un nouveau projet arrivera. Mais très rapidement, un problème vint sur ma route. A peine avais-je fait une première couture que mon aiguille cassa ! Je savais bien qu’elle était ancienne, bientôt à changer, mais m’abandonner dans un moment pareil, c’était consternant pour ne pas dire, déprimant… Quoique non, le pire était de me rendre que dans mes quatre-vingt-cinq mètre carrée d’atelier, je n’avais plus une seule aiguille de rechange.

—C’est ça Benedict Greenfield, de procrastiner sur des choses que tu considères comme détailleux… soufflais-je en me rendant à l’évidence.

Je devais me rendre à la boutique pour, au mieux, chercher une nouvelle aiguille d’ici demain matin, au pire, coudre là-bas. Après tout, cette boutique était la mienne, je pouvais bien me permettre ce genre d’extravagance. Dans l’éventualité d’une absence d’aiguille nouvelle, je pris mes découpes avec moi. Au pire, si le sommeil venait, j’avais un canapé pas si inconfortable que ça. J’arrivais donc vers la boutique aux alentours d’une heure du matin. L’absence de l’activation des alarmes auraient dû me mettre la puce à l’oreille, mais j’avais naïvement songé que la personne de fermeture avait peut-être oublié. Et, heureusement, j’avais tort puisqu’après avoir passé la porte, je tombai sur December…. Nettoyant le sol ? Je voyais que nous partagions la même sidération à cet instant, et si je n’étais pas mort d’inquiétude, et noyé sous une tonne de question, j’aurai trouvé cette scène hilarante.

—Ember… ? Mais, murmurais-je en écarquillant les yeux longuement, qu’est-ce que tu fabriques ? Enfin… Oh non, ne me dis pas que tu nettoies ce magasin car tu as tué quelqu’un dans nos locaux !

Explosion de larmes comme unique réponse. Bon… Eh bien, mon désarroi n’était que plus grand. Je posais mon sac devant la porte ouverte —histoire de la caler— avant de m’approcher de mon employé. Je savais bien qu’il n’était pas du genre à finir dans une vidéo de true crime, pour autant, l’idée m’avait vraiment effleuré l’esprit, et je me sentais bien bête d’avoir eu cette idée-là.

—Qu’est-ce qu’il se passe ? Je veux dire, pour que tu viennes ici ? Tu as un logement ? Tu as besoin d’aide pour te loger, peut-être ? Tu ne peux pas rester là, mais je peux peut-être t’aider, je connais des endroits où tu peux avoir de l’aide, ou on peut te trouver un hôtel sympa ?

Beaucoup de question, oui, mais j’étais, je pense, aussi perdu que le jeune homme. Finalement, je posais ma main sur son épaule, pour tenter de capter son attention.

—Je ne cherche pas à t’engueuler, mais il va falloir m’expliquer ce qu’il se passe pour que je puisse t’aider au mieux, d’accord ?

J’appréciais énormément toute l’équipe que j’avais sous mon aile. Je savais certaines choses de leurs vies et vice-versa, toujours dans une ambiance bienveillante et douce. Cette nuit, il était impératif que je l’aide, peu importe la raison de son mal-être.

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