You live in my head rent free | Ft. Minkyu

Les écouteurs dans les oreilles tu te rends jusqu’à la supérette pour acheter de quoi grignoter. Flemme de cuisiner et puis en plus t’as envie de squatter le canap’ toute la soirée à rien faire. La journée à été longue, mais t’es bien content qu’elle soit terminée. Tu n’as même pas regardé s’il jouait ce soir. Sa voix te manque, mais tu as trop honte de ce que tu as fait pour y retourner. Faire appel à quelqu’un qui se prostitue et ne rien faire, juste parler… il avait été vraiment gentil. Et évidemment que tu n’allais rien faire, tu n'es pas ce genre de personne. T’es dans tes pensées, et même si tu penses à lui, l’homme qui sort de chez un de tes voisins lui ressemble beaucoup. Sûrement parce que c’est lui. Qu’est ce qu’il fait là? Non en fait tu ne veux pas savoir. Tu te retrouves face à lui, tu t'arrêtes et ton cœur loupe un battement. Ça devrait être interdit d’être aussi beau. C’est fou d’avoir un crush aussi fort sur quelqu’un que tu connais à peine. Tu fais un gestes timide de la main

“Salut…”

Tu supposes que tu as bien fait de ne pas aller au bar, il n’y chante pas ce soir. Il a tellement de talent, tu ne comprends pas qu’il se retrouve à faire des activités si… dévalorisant. Il y a des chanteurs bien moins agréables à écouter et à regarder… kanye par exemple… pourtant c’est une star internationale.

“Hum…. Comment ça va?”

T’es pas très à l’aise face à lui. Il a sûrement mieux à faire que de te taper la discute. Surtout gratuitement. Tu devrais sûrement rentrer chez toi et te cacher sous ta couette parce que t’es trop nul. Quelle idée tu avais eu de le payer… tu aurais dû annuler… ne jamais aller le voir comme ça… il devait te prendre pour un gros naze. Et pour le coup, tu te sentais comme tel.

Des clients j'en avais de toutes sortes, ceux qui voulaient juste me baiser, d'autre qui voulait se faire prendre et puis les petites gâteries. Je ne mettais pas dans le même panier les personnes qui payaient simplement pour avoir de la compagnie, que je leur serve de plante verte pour x ou y raisons. C'était surement la partie que j'appréciait le plus de ce "travail" là. Je n'aimais pas particulièrement partager un moment dans un lit avec quelqu'un mais c'était le seul moyen que j'avais trouvé étrangement pour gagner ma vie. Juste en chantant dans le bar, ça n'allait pas remplir mon ventre ni payer mon loyer même s’il n'était pas élevé. On me disait que je pourrais facilement trouver un job plus tranquille mais ma petite période en tant que serveur m'avait rendu malade envers l'être humain. Me confirmant que je n'étais qu'une simple poupée vivante finalement. Il y avait des soirs où c'était plus compliqués que d'autres, surtout quand j'avais plus que deux clients à aller voir et que la faim me tiraillait l'estomac. Je ne faisais pas ce genre de trucs chez moi, hors de question de les laisser entrer dans mon sanctuaire de repos. Je les retrouvais soit chez eux soit dans une chambre d'hôtel. La plupart du temps, les infidèles c'était à l'abri des regards ou les hommes d'affaires qui passaient dans le coin et avait besoin d'assouvir leur besoin. Marié ou pas, c'était leur problème de toute façon. Mon dernier client, vivait dans une petite maison dans le quartier de Fremont. C'était assez sympathique, j'aimais bien son côté artistique et bohême qui me détendait aussi. L'affaire réglé, je sortais de là en rangeant la liasse de billet dans mon sac avant de chercher mon paquet de cigarette dans ma poche et de constater avec agacement qu'il était vide. Pourquoi je ne l'avais pas jeté tiens ? Un papier plié à l'intérieur me faisait me rappeler que j'avais eu le droit à un numéro potentiel d'un client riche par une autre escorte girl que j'avais rencontré. Je tournais la tête en entendant un "salut". Quelques secondes pour me souvenir qui était ce mec.

- Salut

Est-ce qu'il habitait dans le coin ? Je supposais que oui vu le sac de course dans sa main. La dernière fois qu'on s'était vu il s'était montré très timide. Je n'avais pas trop compris pourquoi. Je ne forçais évidemment pas les gens à coucher avec moi. On s'était juste contenté de discuter du coup et j'avais appris qu'il venait souvent au bar où je chantais.

- Ca va mais ça irai encore mieux avec une cigarette et un repas. Et toi ? Dure journée ?

Il me semblait qu'il bossait dans l'informatique, quelque chose comme ça. A part jouer à des jeux vidéo ou discuter sur internet, je n'y connaissais pas grand-chose dans ce domaine.

Ça fait un bail que t’as pas eu un crush aussi fort sur quelqu’un. En même temps tu ne sort pas si souvent que ça, même si tu es sorti pour le voir chanter à plusieurs reprises. Et t’es pas du genre doué en termes de drague, t’es même plutôt mauvais et particulièrement awkward, t’aurais pu l’inviter à boire un verre… à la place tu l’a cherché sur un site de rencontre. Tu voudrais avoir plus confiance en toi, avoir du répondant comme Ryan Gosling dans crazy stupid love. Tu es malheureusement à des années lumières de son charisme. Et là tu te retrouves devant cet homme qui te plaît tant avec pour seule phrase d’accroche un “salut’. Reprends toi un peu, aies un peu de prestance, fais un effort!

“Oh hum” tu cherches dans ta veste et lui tend ton paquet de cigarette. “J’peux dépanner.”

Tu souris timidement. Tu ressemble a un ado qui parle à son crush pour la première fois, t’es pas à l’aise mais t’es juste content qu’il t’ai répondu et ne se soit pas contenté de passer son chemin. Il aurait pu, t’es juste l’abruti qui l’a payé pour parler….. c’est tellement la lose, il doit tellement te prendre pour le plus gros loser de l’histoire, t’as envie de disparaître. T’es rien qu’un idiot face à l’un des hommes les plus beaux que tu aies eu la chance de voir.

“Ma journée… euh… comme d’habitude… et hum… j’comptais manger n’importe quoi…” tu montres ton sac de courses rempli de snacks. “J’habite quelques maison plus loin… je peux… enfin… si… ça te dis… je peux partager….”

On dirait que tu viens de courir un marathon tellement tu ventiles… c’est compliqué de sortir une phrase pourtant si simple… il va te prendre pour un gros creep… qui l’invite chez lui… Tu aurais dû te taire, t’as rien de cool n’y d’intéressant, t’es juste un gros nul quand il est question de relations humaines.

Penchant légèrement la tête sur le côté, je regardais le jeune homme timide qui me faisait face. C'était bien la première fois que je faisais une telle impression, c'était un peu bizarre. Mais en même temps cela rendait mon interlocuteur mignon en quelque sorte. Au moins je ne terminais pas cette soirée par une mauvaise rencontre même si elle semblait être un peu assombri par le manque de nicotine dans ma poche. Il m'avait alors tendu son paquet de cigarette, et comme si c'était le plus beau cadeau de l'année, je lui offrais un sourire.

- Ah merci

J'attrapais le paquet, mes doigts frôlant les siens au passage sans faire exprès. Je prenais une cigarette avant de la glisser dans ma bouche et de l'allumer avec mon briquet. J'expirai la fumée, fermant les yeux avec bonheur. Ce n'était pas bon pour la voix de fumer mais c'était la seule méthode que j'avais trouvé pour me détendre après une grosse journée. Les massages ça coûtait bien trop cher et je n'avais pas de place non plus chez moi pour y déposer un jacuzzi. Mon dieu, je rêvais d'avoir une maison et d'en installer un dans le jardin. Profiter du soleil en même temps, le pied. Mais non à la place je devais supporter mon impitoyable studio et des repas à 5 dollars. J'étais le profiteur des soirées lorsqu'on m'y invitait même si c'était rare, on me trouvait souvent près du buffet. Heureusement, je n'avais jamais encore eu de malaise. La honte.

- Manger n'importe quoi ?

Je n'étais pas vraiment sûr de comprendre ce que cela voulait dire mais en tous les cas, il m'invitait à partager ce "n'importe quoi" avec lui. Je devrais certainement me méfier mais mon estomac me disait le contraire. J'avais beaucoup trop faim et n'ayant pas de voiture je devais soit rentrer à pied ou attendre le bus.

- D'accord...Mais s'il te plaît calme toi, si jamais tu t'évanouis j'aurai du mal à te porter

Je faisais un peu de sport, mais pas de quoi ressembler à un athlète ou à me dandiner sur une plage. Je gardais une apparence fragile, surtout à cause des vêtements amples que je portais la plupart du temps. Je fournissais uniquement des efforts lorsqu'il le fallait ou pour des nouveaux clients. Ceux d'aujourd'hui étaient des réguliers alors autant dire qu'ils connaissaient aussi mon corps et mes tatouages par coeur.

- Tu t'appelles comment déjà ? Je me souviens que c'était peu commun

Demandais-je avec une petite moue désolée. Ce n’était pas pour le vexer mais autant ne pas l'interpeller avec un "hé toi" la prochaine fois qu'on se croisera. Ou peut-être qu'il osera faire quelque chose cette fois-ci plutôt que de parler. Pas que cela me dérangeait mais j'avais perdu l'habitude depuis le temps qu'on veuille simplement sympathiser avec moi. Boire juste un café en discutant d'intérêts communs ou me faire découvrir des trucs.

Vous partagez le vice du tabac. Un jour tu arrêtras cette merde. Avec un peu de force d’esprit tu y arriveras, mais pas tout de suite. Aussi mauvais que ce soit, ça te permet de parler à Minkyu. Tu ne pensais pas en avoir de nouveau l’occasion un jour… trop honteux de ce que tu as fait. T’arrives même à lui proposer de manger avec toi. Tu ne sais pas d’où te vient ce courage, mais il est le bienvenu. Tu ouvres légèrement le sac que tu tiens.

“J’ai des cheetos, des beef jerky, de la glace rocky road… et d’autres trucs du même genre… d’la mal bouffe quoi…” Ouais, pas des trucs qui devraient constituer un repas, et puis tu panique légèrement. “Mais j’mange pas comme ça tout le temps hein c est juste que là… bref… fin voilà.”

Tu ne voulais pas qu’il pense que ce genre de repas était une habitude pour toi. Ce n’était rien qu’un cheat day occasionnel, le reste du temps tu mange équilibré et tu fais du sport… juste que ce soir, tu avais eu envie de te laisser aller… c’était pas le bon soir… tu ne faisais pas bonne impression. Il te demande de te calmer, et tu es gêné de manquer de sang froid. Tu baisses la tête pas très fier.

“désolé…”

Tu manques de confiance en toi, et ça se voit, tu aimerais tellement être plus à l’aise avec les autres. C’est pas comme ça que tu vas lui plaire. T’es un loser, c’est pas comme si t’avais une chance. Il ne se souvient même pas de ton prénom, c’est clairement que tu ne lui a pas fait grande impression.

“Virgil…”

Tu reprends doucement ton chemin direction ta maison. Au moins c’est rangé, tu n’auras pas a avoir honte d'avoir laissé traîner tes affaires.

“Oh hum… tu n’as pas d'allergies aux chats… ou peur des serpents?”

Le vivarium prend une certaine place chez toi, au moins il a la place nécessaire pour se balader. Tu sais que beaucoup ont la phobie de ces bêtes pourtant si magnifique. Il faut que tu installes un autre vivarium à l’étage pour adopter un nouveau reptile. En peu de temps vous êtes chez toi, tu passes le portail puis tu vas ouvrir la porte.

“Vas y entre, fait comme chez toi”

Le chat le voit et grimpe sur les plateformes installées pour lui qui lui permettent d’observer en hauteur. Comme toi, il n’est pas très à l’aise avec les nouvelles têtes.

Je comprenais mieux le "n'importe quoi" évoqué par mon interlocuteur. Cela me rappelait quand j'étais adolescent et que j'embarquais des snacks pour aller m'installer dans le parc à côté de chez moi plutôt que de rester enfermé. Profiter du soleil de Los Angeles et de la verdure qu'il pouvait y avoir à différents endroits. La mélancolie pouvait se lire sur mon visage alors que je repensais à cette période qui était révolu depuis des années maintenant. Je revenais toutefois rapidement sur terre, ne souhaitant pas que le jeune homme pense que j'étais en train de l'ignorer alors qu'il m'avait invité à partager un repas avec lui. Cette soirée avait pris une tournure inattendue mais pas déplaisante pour autant. Déjà, elle était un peu sauvée par la cigarette gentiment offerte par mon homologue.

- Ça me va tout à fait

Je ne mangeais pas forcément équilibré en temps normal de mon côté alors je n'allai pas faire le difficile. Je sautais plus de repas qu'il n'en fallait à cause de ma vie bordélique et je devais certainement manquer de quelques vitamines à force. Mais un jour je pourrais m'offrir le luxe de cuisiner un bon repas deux fois par jour autour d'une jolie table et dans une vraie cuisine. Pas dans un studio de 20m².

- Pourquoi tu t'excuses ?

Il n'y avait aucune raison de le faire. Ce n'était pas comme si je l'avais disputé, ou peut-être est-ce qu'il l'avait interprété de cette manière ? C'était flagrant que cet homme manquait de confiance en lui et pour une raison qui m'étais inconnue, je l'intimidais. C'était bien la première fois que je faisais cet effet à quelqu'un. On me voyait plutôt comme la bête à impressionner justement.

- Enchanté Virigil, moi c'est Minkyu

Autant reprendre sur de bonne base pour essayer de détendre Virgil même si il se souvenait probablement de mon nom. Je le suivais donc jusqu'à sa maison, terminant ma cigarette. En entendant qu'il avait un chat chez lui, un sourire s'était affiché sur mon visage. J'adorais les animaux en général, c’étaient les seuls êtres humains qui donnait réellement de l'affection sans arrière-pensée. Mais les chats avaient toujours eu une place spéciale dans mon coeur sans que je ne sache pourquoi. Peut-être que dans une autre vie j'en étais un.

- Non...je suis juste allergique aux crevettes

C'était un comble pour un coréen surement, mais si j'en mangeais mon visage se mettait à gonfler et j'avais du mal à respirer. Autant prévenir Virgil tout de suite sur ce sujet.

- Pour les serpents je n’en ai jamais vu en vrai, je ne sais plus si j'avais fait une sortie scolaire dans un zoo mais en tous les cas ça ne m'a pas marqué

En tous les cas en vidéo ou en photo, je ne me sentais pas mal à l'aise. Il m'aurait dit une mygale, peut-être que ça serait moins bien passé. Un serpent ça restait beau en quelque sorte.

- Je ne te voyais pas avoir un serpent en te voyant, tu es pleins de surprises

C'était évidemment un compliment. Il était une énigme en vérité et j'étais curieux de savoir ce qu'il cachait d'autre. Je n'allai toutefois pas tarder à le savoir une fois arrivé à notre destination. Je regardais la maison qui nous faisait face. J'ignorais qu'être agent de cybersécurité payait autant.

- Merci

J'entrais donc dans la demeure, retirant mes chaussures par réflexe avant de me débarrasser de ma veste. Il ne m'avait pas fallu longtemps pour repérer le maître des lieux et m'approchait du chat qui était monté sur son perchoir.

- Bonjour toi, je suis un ami de Virgil

Ce n’était peut-être pas vraiment le terme pour désigner notre relation mais le chat n'était pas obligé de le savoir.

- Comment il s'appelle ?

Demandais-je en me tournant vers Virgil.

La soirée prend un tournant bien différent de ce à quoi tu t’attendais. Tu es davantage habitué à passer tes soirées seul, à faire du crochet devant la tv après un repas partagé en compagnie de ton chat qu’avec quelqu’un. Même si ce quelqu’un est l’une des personnes qui t’as parfois poussé à sortir, même s’il ne le sait pas. La première fois que tu es allé dans ce bar, c’était suite à une invitation d’un collègue de travail, et tu avais craqué sur le chanteur… oops. Pourquoi tu t'excuses? Parce que c’est ce que tu fais tout le temps, tu t’excuse de tes défauts, d’être toi et d’avoir du mal à être toi. Ta seule réponse est un haussement d’épaule. Et puis tu lui rappelle ton prénom et lui le tiens.

“Oui, je m’en souviens.”

Tu souris légèrement. Tu n’oublierais pas le prénom d’une personne qui te plaît autant. Ce serait bête. En te rendant jusqu’à chez toi, tu le préviens d'avoir un serpent et un chat. Sait-on jamais… Il peut avoir peur ou être allergique.

“C’est pas le genre d’animal que je prévois avoir… Ni même que je consomme de façon régulière…”

C’est vrai que les crevettes, c’est pas un crustacé que tu consommes toutes les semaines. Une fois de temps à autre, si elles sont décortiquées, parce que sinon, avouons-le, c’est chiant.

“J’aime bien les serpents… Ils sont calmes, beaucoup les pensent mauvais, mais ce sont des animaux merveilleux.”

Vous arrivez chez toi, il est comme toi, il enlève ses chaussures à l’entrée. Le vicarium prend tout le mur à droite de l’entrée sous la cage d’escalier et le chat quant à lui se balade sur ses plateformes. Tu vas jusqu’à la cuisine ouverte pour y déposer ton sac de course et mettre la glace au congèle alors que Minkyu va voir le chat et te demande son prénom. Le matou miaule comme pour lui répondre.

“Lancelot. Il aime bien parler. Et le serpent c’est Pendragon. C’est quoi ton animal préféré?”

Tu fais ton curieux. En même temps, tout chez cet homme t’intéresse… Tu voudrais qu’il soit à toi, l’écouter chanter à longueur de temps, sortir avec lui, mais tu sais qu’il a sûrement mieux à ses pieds.

“Tu veux boire quelque chose… j’ai du vin, des bières, et du whiskey… Sinon, j’ai aussi des soda et du ice tea…”

Tu ne reçois pas souvent, mais tu as quand même quelques bonnes bouteilles. Tu mets tous les snacks que tu as pu acheter sur un plateau que tu ramènes sur le canapé et tu ranges rapidement ta pelote de laine et la peluche que tu étais en train de faire et que tu avais laissée sur le canapé.

“Si tu veux, je sortirais Pendy tout à l’heure… c’est un python royal… Il n'est pas venimeux.”

Tu préfères préciser, il est très calme et apprécie être de sortie quand tu crochettes ou que tu regardes la télé le soir. Et toi, tu aimes qu'il soit avec toi, tout comme ton chat, un bavard avec qui tu discute souvent. 

Comme supposé, Virgil se souvenait de mon nom. Ce qui était plutôt agréable en vérité, que je n'étais pas juste un mec qu'il avait payé par ennui ou quoi. J'ignorais toujours pourquoi il n'avait rien voulu faire ce jour-là mais je ne voulais pas non plus gêner avec cela. Je voyais bien que ma présence le faisait déjà sans que je n’aie besoin de faire quoique ce soit. Cette soirée promettait d'être surprenante mais dans le bon sens. Virgil m'avait prévu qu'il avait un chat et un serpent, au cas où. Je n'avais aucun problème avec ces animaux-là, ma seule bête noire étant les crevettes mais mise à part dans une assiette je ne voyais pas vraiment comment tomber dessus. A moins d'avoir un élevage chez soi. J'étais cependant intrigué par la présence d'un serpent chez le jeune homme car l'idée ne me serait pas venue à l'esprit. Je n'en avais pas vraiment peur, j'étais plus comme admiratif de ces bêtes-là qui dégageaient quelque chose de majestueux. Surtout les gros.

- On a tendance à croire ce que nous montre les films

Cela commençait enfant avec Le Livre de la Jungle où le serpent hypnotisait l'enfant pour pouvoir le tuer. Evidemment, cela restait ancré dans notre mémoire ce genre de chose. J'avais toutefois hâte de voir le serpent ainsi que le chat évidemment. Une fois la porte de la maison ouverte, il ne m'avait pas fallu longtemps pour le voir et m'approcher lui pour établir un contact. C'était plus fort que moi.

- Tu es fan de la mythologie arthurienne ?

Demandais-je en entendant les noms qu'il avait donné. Lancelot était un tout mignon petit siamois. Quant au serpent, Pendragon collait bien avec cet animal.

- Le chat, si j'avais la possibilité, j'en aurais un chez moi mais c'est compliqué...Alors je m'occupe des chats errants à la place

Expliquais-je avec un sourire un peu triste mais bon, c'était mieux pour le félin de ne pas passer ses journées ou mourir de faim parce que je n'avais plus rien pour le nourrir. Je laissais Lancelot tranquille, ce dernier décidera plus tard ou non de venir me voir. Je revenais près de Virgil qui était en train de préparer les snacks.

- Une bière ça sera parfait

Après une rude journée, cela faisait toujours très bien de boire une bonne bière fraîche. Je n'aimais pas spécialement boire mais parfois il y avait des clients qui, eux, aimaient bien et j'étais obligé d'en consommer aussi.

- Je ne sais pas vraiment si je serai à l'aise de savoir qu'un serpent se balade...

Avouais-je tout de même, pas vraiment rassuré pour autant. C'était peut-être comme certains chiens, ils n’aimaient pas les étrangers et montraient les dents.

- Tu fais du tricot ?

J'avais évidemment remarqué la pelote de laine et la peluche en cours de création avant qu’il ne les range. C'était encore une fois une surprise au sujet du jeune homme.

- Il y a encore d'autres choses que je devrais savoir à ton sujet ?

Ce n'était pas du tout un reproche, simplement pour savoir s'il avait d'autres hobbies ou une histoire qui n'avait rien à voir avec le cliché du geek que je m'étais faits.

Il est vrai que les serpents sont souvent dépeints comme des êtres mauvais, et ce depuis la nuit des temps. C’est bien dommage, car ce sont des êtres formidables, et puis leurs venins regorgent de promesses d’avancées exceptionnelles pour la médecine. C’est dommage que les gens en aient peur. Toi tu les apprécie, et si ça ne tenait qu’à toi, tu en aurais d’autres, en tout cas tu aurais d’autres reptiles. C’est prévu, mais les vivariums sur mesure, ça prend du temps et il faut que tu te décides sur la façon dont tu veux agencer ton bureau à l’étage. Il va falloir que tu fasses venir un professionnel, mais encore une fois, il faut prendre le temps de s’en occuper.

“Fan peut-être pas, mais je trouve ça intéressant. J’aime bien quand il y a des films ou des séries qui tournent autour de cette histoire.”

En règle générale, tu aimes la fantaisie et le fantastique. La magie, c’est quelque chose qui te plaît, peut-être parce que tu aurais aimé avoir le pouvoir de te défendre contre tes harceleurs. Minkyu te dit qu’il aimerait avoir un chat.

“Oui, ce sont des boules de poils vraiment adorable, mais qui coûtent cher en frais vétérinaire.”

La moindre visite chez le véto atteint tout de suite les cent dollars, voire plus. Ça monte vite, mais tu as de l'argent pour… Le fait est que ton compte en banque reçoit plus d’argent que tu n’en dépense. Les grosses dépenses que tu as pu faire, c’est lorsque tu as acheté cette maison et que tu t’es lancé dans les travaux. Mais vu que tu as voulu faire un maximum de chose toi-même, tu n’as pas eu à payer la main d'œuvre. Parce qu’en plus de ne pas être dépensier, tu es économe. Tu sors deux bières alors que ton invité confie ne pas aimer l’idée que Pendragon se balade. Tu souris.

“Alors il restera dans son vivarium, mais il n’y a vraiment pas à le craindre, il est très gentil.”

Il aime pouvoir se balader, et il aime être à tes côtés, parce qu’évidemment tu ne le force pas à rester sur toi, pourtant il passe du temps sur toi. Mais tu comprends que tout le monde n’apprécie pas ça. Tu poses bières et snacks sur la petite table et il te questionne sur ta pelote de laine.

“Oui, et du crochet… Installe toi et sers toi!”

Tu fais de même et tu allumes la télé pour mettre une chaîne musicale alors qu’il te demande s’il ya d’autre chose à savoir sur toi. Tu hausse les épaules. Tu ne vois pas vraiment ce qu’il y a à dire sur toi.

“Il n’y a pas grand chose à dire… il y a plus intéressant que ma personne…”

Du moins, tu ne te trouves pas vraiment intéressant. La chose la plus cool à ton sujet, c’est ton serpent, et la plupart des gens trouvent que le tricot et le crochet, c’est tout pourri et pour les vieux alors tu ne t’en vante pas vraiment. Tu observe Min un instant avant de baisser la tête.

“Dis… Pourquoi est-ce que tu… fais ce que tu fais?...” “Te prostitue” c’était un peu trop direct pour toi. “Enfin, t’es pas obligé de me répondre hein! Si tu veux pas j’comprend!”

C’est personnel comme question. Et qui sait il le fait peut-être par choix, tu ne juge pas, c’est pas ta place… Mais avec une voix comme la sienne, il pourrait vivre de son art..

Je comprenais car j'étais aussi intéressé par tout ce qui était mythe. Je n'étais pas vraiment fan des séries ou des films classiques, je m'ennuyais rapidement devant ou alors je devais être avec quelqu'un et commenter ensemble ce qui se passait. C'était qu'à ce moment-là que ce genre-là, m'amusait. Etrangement, j'étais content d'avoir un point commun avec Virgil même si on en avait encore vu qu'il aimait visiblement aussi les chats comme moi. La seule différence étant que je n’en possédais pas. Je ne pourrais pas lui offrir suffisamment d'affection et les frais en plus de la nourriture. Comme venait de le dire mon interlocuteur, le vétérinaire ça coûtait cher.

- Oui pour tous les animaux dès qu'ils sont malades il faut sortir le chéquier

Virgil ne semblait pas manquer d'argent alors pour lui ce n'était surement rien du tout comme dépense. Je me basais évidemment que la maison et aussi le vivarium qui décorait le salon là-bas. Je ne m'étais pas encore approché pour voir le serpent, j'étais un peu nerveux et en même temps curieux. Je ne cachais pas ce sentiment à Virgil qui prenait plutôt bien la chose.

- Je n'en doute pas, après tout son maître est gentil aussi

Sauf s’il ne faisait que jouer à la comédie depuis notre rencontre pour mieux me briser le coeur ensuite. C'était déjà arrivé par le passé et ouais, naïvement je me jetais la gueule ouverte encore une fois dans ce qui était possiblement un piège. Pas que j'éprouvais encore un attachement envers Virgil, je le trouvais simplement adorable quelque part.

- J'ai jamais essayé d'en faire, ça me paraissait compliqué quand je voyais ma nourrice tricoter

Avouais-je d'un air pensif, me souvenant de ces moments où j'avais pu respirer dans mon enfance, sans avoir mon père sur le dos. Ma nourrice avait un peu eu le rôle de "mère" dans ma vie et j'avais été triste de la voir partir quand mon père avait jugé que j'étais assez grand pour me garder tout seul. Si j'avais su faire du tricot nul doute qu'il me l'aurait fait regretter. J'attrapais ma bière, buvant une gorgée de la boisson et attrapant quelques cheetos avant de commencer à les manger. Savourant le goût du fromage.

- Hum...Pourquoi est-ce que tu te dénigres autant ?

C'était un peu drôle que je pose cette question vu ce que je faisais avec moi-même mais depuis le début de cette soirée, Virgil avait été bien plus intéressant que la majeure partie des personnes que j'avais rencontrés dans ma vie.

- Coucher avec des gens en échange d'argent ?

Je reformulais la question de Virgil, mâchouillant un morceau de beef jerky tout en réfléchissant à la manière la plus simple de lui répondre.

- Disons que je sais que je plais physiquement et que certaines personnes sont prêtes à payer des centaines de dollars pour me baiser alors autant en faire un business...Est-ce que cela te dérange ?

Demandais-je en retour, le fixant du regard pour voir sa réaction. Je ne lui devais rien au sujet de ma vie privée mais j'avais senti qu'il n'était pas très à l'aise avec mon deuxième emploi. J'avais pourtant essayé de gagner ma vie autrement en arrivant à Seattle mais cela n'avait pas fonctionné. On me voyait toujours comme un morceau de viande et j'avais bien dû me faire à cette idée.

Oui, un animal malade, ça coûte cher, mais bon, c’est comme un enfant, quand on adopte un animal on accepte aussi les inconvénients qui viennent avec. C’est un engagement et beaucoup ne s’en rendent pas compte, et c’est comme ça qu’on rend des animaux malheureux. Tu souris, un peu gêné. Ouais, tu es gentil, c’est généralement pas un compliment qu’on fait à quelqu’un qu’on voudrait courtiser. Pas que Minkyu ait vraiment d'intérêt à ton égard et tu le comprends. Tu mentionnes que tu fais du crochet en plus du tricot.

“C’est pas si difficile une fois qu’on à le coup de main… Ça peut prendre un petit peu de temps mais ça devient rapidement automatique…”

Des années que tu en fait, pour toi, c’est comme une seconde nature, le plus difficile au final, c’est de faire des nouveaux patterns, mais en prêtant un peu d’attention on s’y fait vite. Tu hausse les épaules quand il te demande pourquoi tu te dénigres.

“C’est juste que c’est vrai… j’ai pas grand chose à dire sur moi.”

Et sans entrer dans les détails, il y a des habitudes qui sont difficiles à tuer. Ta psy essaie de t’aider à travailler là dessus, mais elle a du mal. Au final, la seule chose dans laquelle tu as confiance en toi, c’est dans ton travail. Peut-être parce que c’est comme jouer un rôle scripté, tu sais exactement ce que tu dois faire et tu sais le faire donc c’est facile. Quand il reformule ta question tu bois une gorgée de ta bière et détourne le regard. C’était… direct. Au moins il est conscient d’être beau… En même temps, même un aveugle s’en rendrait compte.

“Pas toi? J’veux dire… Mon avis importe peu.  C’est ton corps tu fais ce que tu veux…” T’as pas vraiment ton mot à dire, toi c’est pas quelque chose que tu aimerais faire. “C’est juste que… c’est pas un métier que les gens font par choix généralement… et… avec ta voix… tu pourrais juste travailler dans la musique…”

Tu essaies au mieux de ne pas le vexer, parce que ce n’est vraiment pas ton objectif, mais c’est vrai que tu ne comprends pas du tout pourquoi il en est arrivé là. Et pour toi c’est plutôt négatif… tu es du genre à garder les moments intimes pour les gens pour qui tu as des sentiments. Tu n’as jamais couché avec quelqu’un juste comme ça… Tu es peut-être un peu prude sur le sujet mais pour toi, c’est un moment d’amour…

J'avais l'impression que dire qu'il était gentil ne lui avait pas plu. Pourtant ce n'était pas dit du tout méchamment, venant de moi c'était même plutôt un compliment mais visiblement, Virigil ne l'avait pas reçu ainsi. J'allai devoir réfléchir à ce que je disais pour ne pas faire fuir mon interlocuteur. C'était bien la première fois que cela m'arrivait tiens. D'habitude, je n'avais pas besoin de prendre autant de pincette mais cet homme était différent des gens que je côtoyais habituellement.

- Je vois...Tu crois que tu pourrais m'apprendre ?

Demandais-je avec un sourire innocent. C'était vraiment quelque chose qui m'intéressait et puis peut-être que ça détendait aussi ce genre d'activités ? Lorsque j'avais du temps libre je lisais ou je m'entrainais sur mes chansons mais avoir une nouvelle passion ne me dérangeait pas et puis si j'étais capable de faire une jolie peluche comme lui, ça pourrait décorer mon studio peu chaleureux. Je pourrais aussi dire fièrement à mes quelques amis que c'était moi qui l’avais fait.

- D'accord si tu ne veux pas parler de toi

Je n'allai pas insister si Virgil tenait à rester mystérieux. Je n'aimais pas non plus m'épancher sur ma vie personnelle qui n'avait rien de très joyeux en plus. Je respectais donc sans problème le choix du jeune homme même si pour autant il ne cessait pas de m'intriguer. En passant du temps avec lui j'en apprendrais surement au fur et à mesure à son sujet. Lui, en tout cas ne se gênait pas pour en poser mais je ne pouvais pas lui en vouloir de se questionner sur mon choix de vendre mon corps. J'avais haussé les épaules lorsqu'il m'avait demandé à mon tour si ça me dérangeait ce que je faisais. J'étais habitué et j'avais fini par être plus tenu par l'indifférence de moi-même qu'autre chose. Heureusement, sinon je serai surement en train de déprimer dans le coin d'un bar.

- Disons que c'est un demi-choix

Si j'avais pu je me serais lancé dans un job plus sympa mais je n'avais pas les qualifications pour travailler dans un bureau et j'avais déjà assez donné en tant que serveur. Être à nouveau confronté à de la clientèle ou à du public m'angoissait un peu. Ce qui était paradoxal par rapport à mon activité de chanteur mais c'était différent. La musique mettait en quelque sorte une barrière derrière laquelle je me sentais en sécurité.

- En étant payé 100 dollars par prestation...J'aurai du mal à payer mon loyer et tout le reste pour vivre

Même si mon studio était hyper mal isolé, il se trouvait à Seattle alors je devais payer minimum 500 dollars plus les charges d'eau et d'électricité. Rajouter à cela la nourriture, les produits d'hygiènes et les vêtements.

- Pourquoi tu m'as contacté sur l'appli si tu ne voulais pas faire ce genre de chose ?

Il aurait pu appeler un ami s'il se sentait mal ou avait besoin de parler à quelqu'un. C'était étrange de payer un escort pour ce genre de chose.

Tu es un peu surpris qu’il te demande à apprendre le crochet. Ou le tricot. C’est pourtant des activités qui ont gagné en popularité ces dernières années, pour ton plus grand plaisir. Plus de gens qui pratiquent, plus d’idées à partager sur les réseaux. Bon, tu as des tonnes et des tonnes de créations que tu vends pour pas grand chose, juste histoire de te débarrasser un peu, parce qu’autrement, ta maison serait remplie de peluches et autres créations à en déborder. Tu souris et acquiesce.

“Bien sûr! Pas de soucis!”

Attends. Ça voulait dire avoir l’occasion de le revoir! Alors oui! Tu étais carrément partant pour lui apprendre! Tu rentres la tête dans les épaules un peu gêné quand il accepte de ne pas parler de toi. Tu ne voulais pas passer pour ce que tu n’es pas… C’était sincère quand tu disais qu’il n’y avait rien à dire de particulier sur ta personne.

“C’est pas que j’veux pas… juste qu’il n’y a rien d’intéressant à dire.”

T’es tout ce qu’il y a de plus normal. Aussi ennuyeux qu’un film d’auteur européen. Tu ne sais même pas ce que tu pourrais bien lui dire sur ta personne. Tu pourrais dire que tu as retapé la maison tout seul comme un grand, mais ce serait bizarre de parler de travaux. Il te parle de son boulot.

“Pourtant, tu pourrais donner des cours! Ou tu sais.. Chanter sur les réseaux pour te faire connaître! Tu gagnerais vite en popularité! Et si tu avais tes propres titres tu pourrais même te produire sur spotify!”

Tu parles de façon un peu trop enthousiaste. Il aurait au moins une personne qui l'écouterait de façon quotidienne. Il avait devant lui le Number One fan, président du fan club de Love. Tu rougis à sa question suivante, t’es supposé répondre quoi à ça exactement?

“Euh… je… enfin… il.. y avait des rumeurs… et j’voulais savoir si c’était vrai… et… enfin… je… c’était… pas très intelligent de ma part… je suis désolé…. c’était plus facile que… te parler… au bar…”

Que quelqu’un te sorte de ce bourbier dans lequel tu t’es enfoncé tout seul! Si tu pouvais disparaître tu le ferais. T’as tellement honte de toi. Tu n’as jamais été doué pour aborder les gens qui te plaisaient, et des fois, tes neurones ont des bugs. Comme actuellement, t’es à deux doigts du blue screen.

“J’voulais pas… enfin… je fais pas ça… j’veux dire… tu sais…”

Payer pour du sexe. Ou coucher avec quelqu’un qui n’a pas de sentiments pour toi. Les coups d’un soir, c’est pas ton genre.

Passer du temps avec Virgil était une idée qui me plaisait bien. Il était tellement rare de réussir à rencontrer quelqu'un qui ne voulait pas coucher avec moi, que je préférais garder l'opportunité d'avoir une relation amicale supplémentaire que de me mettre à dos Virgil qui semblait être une personne bien. N'importe qui faisant du tricot de toute façon devait avoir un bon tempérament. Cela demandait de la patience et de la rigueur. Même si vu comment Virgil en parlait, cela paraissait simple.

- Merci Virgil

Je le remerciais avec un ton sincère, il ne savait pas à quel point sa réponse positive me faisait plaisir. Une activité susceptible de me sortir de mon quotidien calamiteux, c'était une vraie porte que je voulais franchir. En sortir sera évidemment un peu douloureux, de revenir dans le monde réel finalement. Mais j'avais besoin de souffler un peu, de m'éloigner de mes tracas pendant une heure ou deux - selon le temps que mon interlocuteur avait à me consacrer.

- Pourtant...

Pourtant de ce que j'avais vu jusqu'à présent il était une personne intéressante mais visiblement il se regardait avec de mauvais yeux ou peut-être qu'on l'avait beaucoup rabaissé dans sa vie. Je connaissais aussi ce sentiment et à vrai dire, j'avais aussi une vision pessimiste de moi-même. Je n'insistais donc pas plus sur le sujet. En revanche, Virgil ne se gênait pas pour me questionner sur ce que je faisais dans la vie, et à remettre en question d'ailleurs mon autre travail. Je savais que ce n'était pas le meilleur métier du monde mais j'avais mes raisons pour en être arrivé là. Me produire dans un bar ne me permettait pas de gagner assez d'argent pour vivre. Je ne m'étais pas attendu à ce que le jeune homme me sorte des propositions avec autant d'enthousiasme, sous entendant aussi qu'il était touché par ma voix.

- Tu exagères un peu, je suis qu'un simple chanteur de bar, je n'ai pas la prétention d'une grande carrière... !

Même si au fond de moi, j'aimerai bien en vivre de la musique. Composer mes morceaux, m'acheter un vrai piano pour pouvoir écrire des mélodies. Et puis évidemment chanter devant des milliers de fans qui seraient touchés par ma musique. Mais ce n'était qu'un fantasme pour moi, la vie réelle était bien moins utopique. Je comprenais que Virgil faisait partie de ces fans dont m'avais parlé Yuna, des clients qui étaient tout le temps au rendez-vous lorsque j'étais marqué sur le tableau noir. Je n'avais toutefois pas pensé que ma question mettrait Virgil dans un tel état de stress.

- Hé calme-toi

Je m'approchais du jeune homme, prenant doucement son visage entre mes mains. J'ignorais pourquoi il avait pensé que c'était difficile de venir me parler au bar, peut-être qu'il craignait de me déranger ? C'était un peu bizarre, j'étais pas du tout une célébrité.

- Je ne t'en veux pas d'accord ? C'était pas stupide mais la prochaine fois viens me parler directement je n'ai jamais mangé personne, promis.

Déclarais-je avec un sourire qui se voulait réconfortant.

Le tricot et le crochet étaient deux activités que tu pratiquais depuis tout petit, à force c’était devenu une seconde nature. Quand tu t’y mettais tu n’avais même plus besoin de penser aux mailles ou autre, juste au pattern que tu avais choisi. La vérité c’est qu’au début c’est un peu dur, mais on step up très vite. Quelques jours suffisent à devenir bon. Et ça te ferait plaisir de lui apprendre. Tu lui réponds d’un sourire avant de manger un morceau. Tu concentre la conversation sur lui parce que tu n’as pas grand chose à dire sur toi. Tu t’étonnes de ce qu’il dit.

“C’est pas vrai!! Il y a de bien plus mauvais chanteurs qui pourtant réussissent. Avec une voix comme la tienne tu pourrais avoir beaucoup de succès! Tu devrais poster des chansons sur tiktok et youtube!”

Il ferait le buzz t’en est certain! Puis il te pose une question sur la raison qui t’as poussé à le payer pour une rencontre et tu panique et puis quand il pose ses mains sur ton visage, tu freeze. Tes oreilles tournent au rouge. Est-ce que tu respires encore? T’as les yeux rivés sur son visage et malgré la proximité tu entends à peine ce qu’il te dis. Il est si beau. Si talentueux. Et en plus de ça gentil. Et mignon.

“Tellement beau…”

C’est presque un murmure et tu ne réalises même pas que tu l’as dit. C’était juste une pensée… une pensée constamment présente quand tes yeux se posaient sur lui. Il te faut une seconde pour te reprendre. Enfin, te reprendre et paniquer. Comme toujours. Il aura beau te dire de te calmer la panique et un état presque naturel pour toi. C’est un de tes plus gros défauts.

“Oh… hum… je… enfin… pardon… j'voulais pas… enfin… j’veux dire… tu disais?”

Mais pourquoi est-ce que tu es aussi naze? Tu voudrais disparaître.. devenir une souris et entrer dans le vivarium de ton serpent. T’as aucun charisme, aucune prestance.